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autres, par le roi, en sorte qu’ils ne tiroient leur droit que de ce que le roi les mandoit, ainsi que depuis les officiers de la couronne dont on avoit besoin pour ce qui regardoit leurs offices, au lieu que les pairs y venoient tous de droit, et que rien ne se pouvoit faire sans eux ; que les procès se multipliant sans cesse depuis que les fiefs eurent, contre leur originelle nature, passé aux femmes, furent devenus susceptibles de partages, de successions, d’hypothèques, et que les coutumes diverses sur toutes ces choses se furent introduites par usages dans les différentes provinces, que les ordonnances se furent accumulées, ce qui causa la multiplication des parlements aux différentes fêtes, qui duroient huit, dix, quinze jours pour vider ces procès ; que saint Louis, qui aimoit la justice, considérant le peu de lumière que ces juges si nobles et si occupés de la guerre pouvoient apporter au jugement de tant de questions embarrassées, et de coutumes locales différentes, mit à leurs pieds des légistes pour être à portée d’en être consultés en se baissant à eux, sans toutefois qu’ils fussent obligés de le faire, ni, le faisant, de se conformer à leur avis ignoré de toute la séance, et qu’ils ne disoient qu’à l’oreille du seigneur aux pieds duquel ils se trouvoient assis quand il vouloit les consulter, et que c’est de là que ces logistes ont été dits conseillers ; que le peuple, esclave par sa nature, peu à peu affranchi, puis devenu en partie propriétaire par la bonté des seigneurs dont ils étoient serfs, forma la bourgeoisie et le peuple, et ceux qui eurent des fonds appelés rotures, parce qu’ils ne pouvoient posséder de fiefs, furent de là appelés roturiers ; que de ce peuple affranchi, ceux que leur esprit et leur industrie éleva au-dessus de l’agriculture et des arts mécaniques, s’appliquèrent aux coutumes locales, à savoir les ordonnances et le droit romain, qui demeura en usage en plusieurs provinces après la conquête des Gaules, et y a été depuis toujours pratiqué. Ces gens-là se multiplièrent avec les procès, s’en firent une étude, devinrent le conseil de