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Leur P. Contencin, revenu en Europe pour leurs affaires de la Chine où il en a été un des plus grands ouvriers, et y retournant en 1729, ne put s’empêcher de dire, en s’embarquant au Port-Louis, que dans peu on verroit l’inquisition reçue et établie en France, ou tous les jésuites chassés. Ce mot fit grand bruit et retentit bien fortement jusqu’à Paris.

En 1732, le P. du Halde, qui a donné les artificieuses relations de leurs missions diverses, sous le titre de Lettres édifiantes et curieuses, et depuis une histoire et des cartes de la Chine, très bien faites, mais où il n’y a pas moins d’art, me vint voir comme il y venoit quelquefois depuis que je l’avois connu secrétaire du P. Tellier. J’en avois été content pour une affaire qui regardoit la Trappe du temps du roi, et à sa mort je lui procurai une bonne pension qui l’établit pour toujours à leur maison professe de Paris, avec commodité et distinction. Il tourna fort son langage, et à la fin me tint le même propos que quinze ans auparavant le P. Lallemant avoit tenu au maréchal d’Estrées, et avec un miel jésuitique me voulut prouver que rien n’étoit meilleur ni plus nécessaire que d’établir l’inquisition en France. Il est vrai que je le relevai si brutalement que de sa vie il n’a osé m’en reparler. C’est ainsi que ces bons pères vont sondant et semant sans se rebuter jamais, jusqu’à ce que, la force à la main, ils y parviennent par l’aveuglement du gouvernement à quelque prix que ce soit et par toutes sortes de voies. Il y auroit, du reste, de quoi s’étendre sur une matière si curieuse et si étrangement intéressante ; il doit suffire ici de l’avoir effleurée assez pour en constater le dessein, le projet, et le travail constant et assidu pour arriver à cette abominable fin.

Goesbriant, qui passoit pour fort riche, appuyé du crédit de Desmarets son beau-père, maria son fils à une des filles du marquis de Châtillon, éblouis, l’un de l’alliance, l’autre des biens, et de se défaire pour rien d’une de ses filles, dont il avoit quantité, et point de fils.