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longue et fort disputée. Il y eut vingt-cinq capitaines de grenadiers tués, et douze cents hommes plus tués que blessés ; on s’établit enfin sur la contrescarpe et sur la lunette [1]. Le maréchal de Villars demeura dans la tranchée jusqu’à onze heures du soir, que le logement fut tout à fait fini. La demi-lune fut attaquée le dernier octobre. On y trouva peu de résistance, tout ce qui s’y trouva fut tué ou pris. On se préparoit à donner le lendemain l’assaut au corps de la place, lorsqu’on aperçut sur le rempart deux drapeaux blancs. Le baron d’Arche, qui commandoit dans la place, avoit abandonné la ville, et s’étoit retiré au château et dans les forts avec tout ce qu’il avoit pu y mettre de troupes. Il avoit laissé dans la ville plus de deux mille blessés où malades, huit cents soldats sains, pour qui il n’avoit pu trouver place dans le château et dans les forts, et, toutes les femmes, les enfants, et force valets de la garnison. Villars fit entrer le régiment des gardes dans la ville, ne permit point à ces bouches inutiles de sortir, quelques cris qu’ils fissent, fit demander un million aux bourgeois pour se racheter du pillage, accorda cinq jours de trêve au gouverneur pour envoyer au prince Eugène lui demander ses ordres, et dépêcha Contade au roi, qui arriva à Marly le lundi matin 6 novembre. Villars donna encore jusqu’au 15 au baron d’Arche, sans tirer de part ni d’autre, mais le maréchal faisant travailler à ses batteries, et le gouverneur envoyant la nourriture à ce qu’il avoit laissé dans la ville. Le mardi 21 novembre, le duc de Fronsac arriva à Marly portant au roi la nouvelle de la capitulation du château et des forts de Fribourg. Il y avoit sept mille hommes fort entassés, qui sortirent le 17 avec tous les honneurs de la guerre, qui finit par cet exploit. Asfeld, longtemps depuis maréchal de France, fut laissé à Fribourg pour y commander, et dans le Brisgau, sous les ordres des du Bourg, commandant en

  1. Petite fortification de forme triangulaire pratiquée dans l’intérieure des demi-lunes.