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Ligue ; quand on n’auroit pas horreur de s’en protéger, au moins les ligueurs couverts du manteau de l’hypocrisie, et voulant exclure Henri IV comme hérétique relaps, respectèrent encore les droits de la nation, et, supposant qu’il n’y avoit plus de princes de la race d’Hugues Capet en état de régner, après avoir échoué à usurper la couronne comme prétendus descendants mâles et légitimes de la seconde race, ils voulurent au moins une figure d’élection, et la tenir de la nation même.

Ici elle n’est comptée que pour une vile esclave, à qui, sans qu’on songe à elle, on donne des rois possibles et une nouvelle suite de rois, par une création de princes du sang habiles à succéder à la couronne, qui ne coûte à établir que la volonté, et une patente à expédier et à faire enregistrer. Dès lors, comme on l’a dit, une telle puissance, établie et reconnue, disposera de la couronne non seulement dans un lointain qui peut ne jamais arriver, mais d’une manière prompte, subite, active, au préjudice des lois de tous les temps, de la nation entière, de la totalité de la maison appelée à la couronne, des fils de France même. Et que penser des désordres si nécessairement causés par un crime de cette nature, de la vie des princes en obstacle, de celle du roi même, duquel, de quelque façon que ce soit, douce ou violente, on auroit arraché cette disposition ?

Voilà donc un crime de lèse-majesté contre l’État qui entraîne très naturellement celui qui est connu sous le nom du premier chef, qui égale les princes du sang, et dans la partie le plus éminemment sensible, à la condition de tous les autres sujets qui leur peuvent être préférés par un roi pour lui succéder, et qui ne va pas à moins par une suite nécessaire qu’à les écraser et à se défaire d’eux. Pendant la violence de tels mouvements que devient un royaume, et que ne font pas ses voisins pour achever de l’abattre et pour en profiter ?

Ces considérations, qui sont parfaitement naturelles, et