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que Louis XIII le vouloit pour en faire un chancelier, et il le fit succéder à Sillery au mois d’octobre de la même année.

Aligre étoit cet ancien. Il étoit de Chartres, petits-fils d’un apothicaire et fils d’un homme qui, pour son petit état, s’étoit enrichi dans son négoce sans sortir de chez lui. Il mit son fils dans la maison du comte de Soissons, à la mort duquel il fut tuteur onéraire de son fils [1]. Cette protection le fit conseiller au grand conseil, et le premier de sa race qui ait porté robe, il parvint après à devenir conseiller d’État, et monta de là à la première charge de la robe, par les raisons qui viennent d’être rapportées. Il ne put s’y maintenir longtemps. La reine mère, réconciliée avec le roi son fils, voulut établir ses créatures. Les sceaux furent donnés à Marillac le 1 juin 1626, et Aligre envoyé chez lui à la Rivière, petite maison qu’il avoit sous le château de Pont-gouin, terre et maison de campagne des évêques de Chartres. Aligre mourut en décembre 1635 à la Rivière, sans en être sorti nonobstant les révolutions des sceaux, et cette maison de la Rivière est devenue un beau château et une petite terre entre les mains de sa postérité.

Il faut remarquer qu’il avoit épousé Élisabeth Chapellier, sœur de M. Chapellier, femme de Jacques Turpin, père et mère d’Elisabeth Turpin, femme de Michel Le Tellier, chancelier de France ; ainsi, ce chancelier étoit cousin germain du second chancelier Aligre, fils du premier chancelier de ce nom. Ce second chancelier Aligre fut conseiller au grand conseil, intendant à Caen, intendant des finances et adjoint un moment avec Morangis, sous le nom de directeur des finances. Il avoit eu une commission à Venise étant fort jeune, et une autre depuis pour être un des commissaires du roi aux états de Languedoc, enfin conseiller d’État et doyen du conseil, et comme tel premier des commissaires nommés pour assister aux sceaux lorsque le roi les voulut tenir lui-même, à la mort du chancelier Séguier, arrivée à Saint-Germain en Laye, 28 janvier 1672 [2],

  1. Le tuteur onéraire était celui qui administrait les biens d’un mineur et en avait la responsabilité. Le tuteur honoraire, au contraire, n’était chargé que de surveiller l’éducation du mineur.
  2. Le tuteur onéraire était celui qui administrait les biens d’un mineur et en avait la responsabilité. Le tuteur honoraire, au contraire, n’était chargé que de surveiller l’éducation du mineur.