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plusieurs autres qui n’ont pas valu la peine d’être rapportées. Il avoit un fils aîné qui se tourna au plus mal ; et il avoit cédé sa charge à son second fils depuis quelques années, qui s’y est conduit bien plus sagement que lui. Il laissa une grande et assez vilaine fille qui épousa, deux ans après, le comte de La Tour, sur lequel il n’est peut-être pas inutile de s’arrêter un moment.

Ces La Tour étoient une branche de la maison de La Tour-Bouillon, que MM. de Bouillon devenus princes ne vouloient point reconnoître, parce qu’ils ne l’étoient pas devenus avec eux et qu’ils étoient demeurés pauvres et peu connus, jusqu’à réputer à injure qu’on leur en parlât et qu’on les crût de même maison qu’eux, sans toutefois aucune autre raison, ni avoir osé leur disputer leurs armes et leur nom, comme Mme de Soubise avoit fait pour les noms et armes à la branche de Rohan Gué de L’Isle ou du Poulduc, qui malgré tout son crédit y fut contradictoirement maintenue par un arrêt du parlement de Bretagne. Ce comte de La Tour, gendre de Sainctot, avoit un frère aîné fort peu accommodé qui ne laissa que des filles, pendant la vie duquel il servoit en Italie subalterne, puis capitaine d’infanterie. Le cardinal de Bouillon, passant en un de ses voyages de Rome, dîna chez M. de Vaudemont. Wartigny, brigadier alors de dragons, duquel il a été parlé quelquefois, étoit une manière d’effronté fort plaisant, d’un commerce ordinairement fort doux, mais qui se choquoit volontiers des impertinences. Il le fut apparemment en ce repas de celles du cardinal de Bouillon qui y étoit un grand maître. Sortant de table, Wartigny trouva sous sa main le comte, lors appelé le chevalier de La Tour, parmi une foule d’officiers qui étoient venus bayer là, et faire leur cour à M. de Vaudemont. Il le prit par le bras, et au milieu de tout ce grand monde, le mène au cardinal et lui dit qu’il le supplie de lui permettre de lui présenter un gentilhomme de sa maison, qui par sa valeur et sa conduite méritoit ses bontés et ses secours, et que tous