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quoi que ce soit dans ces actes, et ne donne aucun poids à rien de ce qui s’y met.

C’est, pour le dire en passant, ce qu’ont saisi les secrétaires d’État pour décrasser leur existence. Elle étoit tout en leur qualité de notaires du roi. C’est par cette qualité que leur signature est devenue nécessaire à tous les actes que le roi signe et qui la rend valide par la force que lui donne l’attestation de la leur, que cette signature du roi est de lui-même, et n’est pas fausse et supposée, ce qui opère qu’elle ne vaudroit pas seule sans celle du secrétaire d’État. Deux secrétaires d’État signoient donc toujours tous les contrats de mariage que le roi signoit, en qualité de ses notaires, et ils sont si bien notaires, que, s’ils vouloient passer des actes entre particuliers comme font les notaires et les signer d’eux, il n’y seroit pas besoin d’autres notaires. Depuis que l’avilissement et la confusion a prévalu par maxime de gouvernement, que par là les secrétaires d’État ont commencé à devenir des métis, puis des singes, des fantômes, des espèces de gens de la cour et de condition, enfin admis et associés en toute parité aux gens de qualité, et que le roi a signé les contrats de mariage de quiconque a voulu lui en présenter, jusque des personnes les plus viles, les secrétaires d’État se sont abstenus d’y signer, et ont laissé la fonction aux notaires. Restoient ceux qui étoient signés en cérémonies aux fiançailles qui se faisoient dans le cabinet du roi, où les secrétaires d’État n’avoient osé secouer leur fonction de notaires.

Les qualités des parties prétendues dans les contrats ne firent point de difficulté tant que cet honneur des fiançailles dans le cabinet du roi fut réservé aux princes qui étoient de maison souveraine ou de celle de Longueville, dont la grandeur des services, des emplois et des alliances continuelles étoit parvenue à la même égalité, même avec des avantages sur les véritables princes des maisons de Lorraine et de Savoie. Mais lorsque les Bouillon, à force de félonies et d’épouvanter