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Mme la duchesse de Berry avoit auprès d’elle une petite favorite de bas étage, bien faite, jolie, d’esprit, qui avoit été élevée auprès d’elle. Elle étoit fille de Porcadel, commis aux parties casuelles [1], et d’une mère femme de chambre principale de Mme la duchesse de Berry, qui étoit fille de… [2], premier chirurgien de feu Monsieur. Elle l’avoit gardée depuis son mariage, et cherchoit à la marier. Elle trouva Mouchy, homme de qualité, avancé en âge, et dans le service, franc bœuf d’ailleurs à embâter. Il étoit parent des Estrées, et cette parenté ne leur faisoit pas déshonneur. Ils en firent leur cour à Mme la duchesse de Berry ; le mariage fut bâclé en un moment. Elle vouloit y être et s’en amuser, et elle ne savoit où le faire. Elle pria tant et si bien Mme de Saint-Simon qu’elle en eut la complaisance. Le festin très-nombreux, le coucher, le dîner du lendemain se fît dans notre appartement, et nous n’eûmes que vingt-quatre heures pour le nommer. Ils ne laissèrent pas d’être magnifiques. Comme il étoit tout près et de la tribune et du plain-pied, Mme la duchesse de Berry en eut tout l’amusement qu’elle s’en étoit proposé. Cette Mouchy fut une étrange poulette, comme on le verra en son temps.

Le marquis de Meuse, de la maison de Choiseul, qui avoit un régiment, épousa en même temps chez la duchesse d’Antin une fille de feu Zurlauben, lieutenant général et, bien que Suisse, homme de qualité, et de la sœur de Sainte-Maure.

L’ennui gagnoit le roi chez Mme de Maintenon, dans les intervalles de travail avec ses ministres. Le vide qu’y laissoit la mort de la Dauphine ne se pouvoit remplir par les amusements de ce très-petit nombre de dames qui étoient quelquefois admises. Les musiques, qui y devenoient fréquentes, par cela même languissoient. On s’avisa de les réveiller par

  1. Le nom est en blanc dans le manuscrit.
  2. Le nom est en blanc dans le manuscrit.