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le grand tour par l’autre côté de la rivière, par où je viens de dire, et fit qu’il arriva trop tard. Villars, arrivant avec le reste de l’armée comme tout étoit fait, enfonça son chapeau, dit merveilles aux tués et aux ennemis delà l’eau qui se retiroient, et dépêcha Nangis au roi qui avoit été un des quatre maréchaux de camp de l’attaque, que Voysin mena au roi le mardi 26 juillet à huit heures du matin, et qui eut force louanges et douze mille livres pour sa course. Les ennemis y perdirent extrêmement, et le maréchal de Montesquiou fort peu. Le fils unique du maréchal de Tourville y fut tué à la tête de son régiment, dont ce fut grand dommage, et laissa sa sœur héritière qui épousa depuis M. de Brassac et fut dame de Mme la duchesse de Berry quand on lui en donna.

Villars, fort étourdi d’une action faite malgré lui, s’en vouloit tenir là ; mais Montesquiou, sûr du roi, se moqua de lui, détacha le soir même du combat, qui étoit le dimanche 24 juillet, Broglio avec douze bataillons sur Marchiennes, où étoit le reste et la plus grande partie des magasins des ennemis, et le suivit en personne avec dix-huit autres bataillons et quelque cavalerie, sans que Villars osât s’y opposer formellement, après ce qui venoit d’arriver. Il prit Saint-Amand en passant, où il y avoit huit cents hommes, et l’abbaye d’Hannon, où il y en avoit deux cents. Villars, aide-major du régiment des gardes et aide-major général de l’armée, arriva le dernier juillet à Fontainebleau avec force drapeaux, par qui on apprit qu’un fils d’Overkerke avoit été tué à Denain, qui étoit officier général fort estimé parmi les Hollandois. Le lundi 1 août, Artagnan arriva à une heure après-midi à Fontainebleau, de la part du maréchal de Montesquiou, son oncle, avec la nouvelle qu’il avoit pris Marchiennes et tout ce qui s’y étoit trouvé prisonniers de guerre. Il y avoit dans la place six bataillons, un détachement de cinq cents hommes de la garnison de Douai, et le régiment de cavalerie entier de Waldec, qui alloit joindre l’armée du prince