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et ce que j’ai rapporté de cette conversation avec le Dauphin et l’abbé de Polignac en tiers, dans les jardins de Marly, mit le sceau à l’assurance. Ma façon d’être à cet égard reviendra trop souvent dans les suites pour ne mériter pas d’être expliquée, puisque l’occasion s’en présente si naturellement.

Le célèbre abbé de la Trappe a été ma boussole là-dessus, comme sur bien d’autres choses dont je désirerois infiniment avoir eu la pratique comme la théorie.

Je tiens tout parti détestable dans l’Église et dans l’État. Il n’y a de parti que celui de Jésus-Christ. Je tiens aussi pour hérétiques les cinq fameuses propositions directes et indirectes, et pour tel tout livre sans exception qui les contient. Je crois aussi qu’il y a des personnes qui les tiennent bonnes et vraies, qui sont unies entre elles et qui font un parti. Ainsi, de tous les côtés, je ne suis pas janséniste.

D’autre part, je suis attaché intimement, et plus encore par conscience que par la plus saine politique, à ce que très-mal à propos on connoît sous le nom de libertés de l’Église gallicane, puisque ces libertés ne sont ni priviléges, ni concessions, ni usurpations, ni libertés même d’usage et de tolérance, mais la pratique constante de l’Église universelle, que celle de France a jalousement conservée et défendue contre les entreprises et les usurpations de la cour de Rome, qui ont inondé et asservi toutes les autres et fait par ses prétentions un mal infini à la religion. Je dis la cour de Rome, par respect pour l’évêque de Rome, à qui seul le nom de pape est demeuré, qui est de foi le chef de l’Église, le successeur de saint Pierre, le premier évêque, avec supériorité et juridiction de droit divin sur tous les autres quels qu’ils soient, et à qui appartient seul la sollicitude et la surveillance sur toutes les Églises du monde comme étant le vicaire de Jésus-Christ par excellence, c’est-à-dire le premier de tous ses vicaires qui sont les évêques. À quoi j’ajoute que je tiens l’Église de Rome pour la mère et la