Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 9.djvu/283

Cette page n’a pas encore été corrigée

ne pouvoit le mener plus loin. Le roi ne considéroit en lui que son nom. Il avoit conservé des amis de son père, et il étoit fort du grand monde, mais c’étoit tout, malgré l’amitié de M. de Chevreuse, qui sentoit bien qu’il n’y avoit point de parti à en tirer. Il étoit si grand seigneur qu’il put se consoler dans soi-même. Il en faut dire encore plus des deux autres, qui par leurs charges existoient d’une façon plus importante pour eux et plus soutenue. Les mêmes, lettres, dont j’ai parlé quelque part ici, qui causèrent leur disgrâce, dont ils ne sont même personnellement jamais bien revenus avec le roi, les avoient bien mis avec Monseigneur, outre l’habitude et à peu près le même âge ; mais ils n’avoient pas auprès de lui les mêmes ailes que M. de Luxembourg, et comme lui avoient perdu M. le prince de Conti, leur ami intime, qui les avoit laissés à découvert à M. de Vendôme et aux siens. Celui-ci n’y étoit plus, mais il y existoit par d’autres, et seroit sûrement revenu après le roi. Ce n’étoit pas qu’ils fussent personnellement mal avec lui ; mais les amis intimes de feu M. le prince de Conti ne pouvoient jamais être les siens. Ces deux beaux-frères, avec de si grands établissements, ne firent donc pas une si grande perte.

Un quatrième se trouva dans un nouveau désarroi. C’étoit La Feuillade. Perdu à son retour de Turin, il avoit cherché à s’attacher à Monseigneur, et à profiter du peu de temps que Chamillart demeura en place pour s’appuyer de Mlle de Lislebonne et de M. de Vendôme. On a vu ailleurs qu’il avoit percé jusqu’à Mlle Choin. Le jeu d’ailleurs le soutenoit à Meudon. Il étoit de tous les voyages, sans pourtant avoir rien gagné sur Monseigneur. Néanmoins, avec de si puissants entours, il comptoit sous lui se ramener la fortune. Il en désespéroit du reste du règne du roi ; et pour celui qui le devoit suivre, il avoit tout ce qu’il falloit pour en être encore plus éloigné ; aussi fut-il fort affligé.

Deux genres d’hommes fort homogènes, quoique fort