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s’étoit souvenu de deux articles de l’ancien projet du premier président d’Harlay, que je n’avois point vus dans la copie que le chancelier m’avoit communiquée : c’étoient les deux derniers coups de foudre. Le premier étoit la représentation de six anciens pairs au sacre, attribuée, exclusivement aux pairs [1], à tous les princes du sang, à leur défaut aux légitimés pairs, sans que les autres pairs y pussent être admis qu’à faute de nombre des uns et des autres. L’autre étoit l’attribution, aux légitimés qui auroient plusieurs duchés-pairies, de les partager entre leurs enfants mâles qui deviendroient ainsi ducs et pairs et feroient autant de souches de ducs et pairs, avec les rangs, honneurs et priviléges maintenant accordés aux légitimés, au-dessus de tous autres pairs plus anciens qu’eux.

Ce que je sentis à deux nouveautés tout à la fois si inimaginables et si destructives seroit difficile à rendre. Je disputai contre le chancelier qui me montra l’article du sacre dans la minute de cet exécrable Harlay, qu’il n’avoit, disoit-il, recouvrée que depuis peu. Je lui remontrai l’antiquité de la fonction des pairs égale à celle du sacre même, et non interrompue jusqu’à présent ; qu’il n’y en avoit jamais eu où les pairs, quand il s’en trouvoit, n’eussent servi, lors même qu’il y avoit plus de princes du sang qu’il n’en falloit pour cet auguste service. Je le fis souvenir de la préférence des pairs par ancienneté sur les princes du sang, aux sacres d’Henri II et de ses fils. Je lui démontrai que cette loi si juste par laquelle Henri III fait tous les princes du sang pairs à titre de naissance, et leur donne la préséance sur tous les autres pairs, n’avoit fait aucune altération à leurs fonctions du sacre. Je lui expliquai le fond, la raison, l’esprit de cette grande cérémonie, par l’histoire, et tout ce qu’elle a de figuratif, dont il n’est pas possible de convenir [2].

  1. À l’exclusion des pairs.
  2. Le manuscrit porte convenir et non disconvenir, comme on l’a imprimé dans les précédentes éditions.