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pour la bonne année. Nous sortîmes des cabinets pour l’aller recevoir. La visite se passa debout dans la chambre du lit, et dura moins d’un quart d’heure. M. le duc d’Orléans s’y posséda si bien, que je ne me fusse jamais douté de rien si j’avois ignoré ce qui venoit de se passer. La visite achevée, ils entrèrent par le cabinet de M. le duc d’Orléans dans celui de Mme la duchesse d’Orléans pour la même visite ; de la porte j’entrevis la duchesse de Villeroy, que j’appelai pour me tenir compagnie dans ce cabinet de M. le duc d’Orléans où j’étois demeuré seul. Elle y vint à demi rechignée, disant qu’elle aimoit trop Mme la duchesse d’Orléans pour pouvoir se souffrir dans ce cabinet-là. Je répondis par des plaisanteries. Comme elle entendit que la visite finissoit, elle me proposa d’aller souper chez elle avec son mari et le duc de La Rocheguyon, pour causer. Je voulus m’excuser, parce que j’étois engagé chez Pontchartrain ; mais elle le trouva mauvais, et ne voulut point rentrer que je ne lui eusse promis d’aller chez elle.

J’avois entendu, lorsque M. le duc d’Orléans alla recevoir Mgr le duc de Bourgogne, qu’on lui avoit rendu réponse qu’on n’avoit point trouvé le maréchal de Besons, et qu’il avoit dit qu’on allât chez Voysin, où il étoit souvent. J’attendis son retour de la conduite de Mgr le duc de Bourgogne, résolu de pousser doucement ma pointe, et de l’abandonner peu à lui-même. Il ne tarda pas à revenir. Je lui demandai s’il avoit réponse de Besons : il me dit qu’il étoit retourné à Paris ; et sur ce que j’en parus chagrin comme d’un contre-temps fâcheux, il me répondit comme un peu moins en malaise, que cela se retrouveroit toujours bien. J’eus d’abord envie de lui proposer de l’envoyer chercher à Paris ; mais à l’air et à la réponse, je craignis qu’il ne me dît de n’en rien faire, et je pris mon parti de ne plus parler du maréchal, mais de lui écrire le soir même, dont bien me prit. Je remis doucement M. le duc d’Orléans sur le propos qu’avoit interrompu la visite, moins pour le presser