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pour en prendre le commandement, qu’il en espéra peu de chose ; aussi toute l’infanterie, qui n’étoit presque [que] milices, jeta les armes dès qu’elle fut attaquée. Les gardes wallones et le peu d’autres corps de troupes ne purent soutenir seuls, ils furent défaits, la cavalerie fut enfoncée ; ce fut elle qui fit le moins mal. En un mot, artillerie, bagages, tout fut perdu, et la déroute fut entière. Le duc d’Havrec, colonel des gardes wallones, y fut tué. Ce malheur arriva le 20 août. Le roi d’Espagne étoit demeuré incommodé dans Saragosse, d’où il en fut témoin, qui aussitôt prit diligemment le chemin de Madrid. Bay rassembla dix-huit mille hommes, avec lesquels il se retira à Tudela sans inquiétude de la part des ennemis depuis la bataille.

M. de Vendôme en apprit la nouvelle en chemin, qui prudemment, à son ordinaire, pour soi, se soucia moins de tâcher à rétablir les affaires que de se donner le temps de les voir s’éclaircir, avant que d’y prendre une part personnelle. Il poussa donc à Bayonne le temps avec l’épaule. Le duc de Noailles avoit eu ordre de l’y aller trouver pour prendre des mesures avec lui pour agir du côté de la Catalogne. Ils envoyèrent de là Monteil au roi pour recevoir ses ordres sur leur conférence, et gagner temps en l’attendant. C’étoit un mestre de camp qui servoit de maréchal des logis de la petite armée du duc de Noailles. Il arriva le 7 septembre à Marly ; il y fut le même jour assez longtemps dans le cabinet, conduit par Voysin, où Torcy fut mandé. Monteil repartit le 9, et trouva MM. de Vendôme et de Noailles encore à Bayonne. À son arrivée, le duc de Noailles publia qu’il alloit trouver le roi d’Espagne avec M. de Vendôme, et fît en effet le voyage avec lui jusqu’à Valladolid, où ils le rencontrèrent.

L’archiduc joignit le comte de Staremberg après la bataille, en présence duquel le parti à prendre fut agité avec beaucoup de chaleur. Staremberg opina de marcher droit à la petite armée que Bay avoit laissée sur la frontière du Portugal,