Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 8.djvu/398

Cette page n’a pas encore été corrigée

un mot des droits, de l’effet, de l’exception de la souveraineté, ni d’état personnel de souverain, ni dans le contrat d’échange, ni dans le brevet de rang de prince étranger. Nulle raison, nul prétexte même le plus frivole à M. de Bouillon de n’être et ne s’avouer pas sujet du roi, lui duc et pair, grand chambellan, et qui n’avoit pas même un pouce de terre hors du royaume, ni lui, ni ses enfants.

Le chancelier, avec des raisons si péremptoires, n’en oublia aucune pour lui persuader qu’il n’avoit aucun prétexte pour se soustraire à cette qualité, ni le roi, avec ce qui se passoit, aucun non plus de l’endurer davantage ; lui remontra tous les fâcheux inconvénients, et tous en la main du roi, qui pouvoient lui arriver de sa résistance ; il essaya de le porter à se reconnoître sujet du roi par un écrit signé par lui, par ses enfants et par ses neveux, tout fut inutile. M. de Bouillon ne connut rien de pis que cet aveu et il espéra tout de sa propre souplesse, de celle du P. Tellier, de ce mélange de bonté et de faiblesse du roi pour lui, surtout de son peu de suite dans ces sortes d’affaires, dont il avoit si souvent fait d’heureuses expériences. Sa famille, néanmoins, qui toute se sentoit si personnellement mal chacun avec le roi, craignit d’irréparables foudres, et le pressa d’accorder au danger et à l’angoisse des conjonctures l’écrit proposé par le chancelier ; mais il résista également à eux et à ses plus intimes amis, et leur répondit avec indignation qu’il étoit trop maltraité pour y consentir. Le mauvais traitement consistoit donc à la radiation des faussetés de Bar et de la qualité de prince aux monuments dont j’ai parlé, et à ôter à Saint-Denis ce que le roi n’y avoit jamais voulu permettre, et qu’il avoit expressément défendu lorsqu’il y fit porter M. de Turenne, et ce que, contre ses ordres, ils y avoient frauduleusement mis depuis. En tout autre pays qu’en France cet insolent refus de M. de Bouillon eût suffi seul pour les accabler et surtout pour leur ôter à jamais ce rang de prince qui soutenoit leur chimère, et que ce refus