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cents pistoles à lui donner, et qu’il lui donna avec excuse sur le malheur des temps, parce que Mme la duchesse de Bourgogne trouva avec raison que ce peu valoit mieux que rien et ne pouvoir jouer.

Ce voyage de Marly fut l’époque du retour des deux sœurs de Mme la duchesse de Berry à Chelles, et de la liberté de Mme de Maré. Elle avoit été gouvernante des enfants de Monsieur en survivance de la maréchale de Grancey sa mère, puis en chef après elle, et l’étoit demeurée de ceux de M. le duc d’Orléans avec beaucoup de considération. Le roi et Mme de Maintenon comptoient qu’elle seroit dame d’atours de Mme la duchesse de Berry qu’elle avoit élevée, et à qui elle paraissoit fort attachée, et Mademoiselle à elle. Madame et M. [le duc] et Mme la duchesse d’Orléans le vouloient. Jamais on ne l’y put résoudre, quelque pressantes et longues que fussent les instances que tous, jusqu’à Mme de Maintenon, lui en firent. Il faut savoir que la maréchale de Grancey étoit sœur de Villarceau, chez qui Mme de Maintenon avoit tant passé d’étés, et puis à Montchevreuil avec lui, et qui toute sa vie en conserva un souvenir si cher, comme je l’ai dit ailleurs. Ce ne fut qu’aux refus opiniâtres et réitérés de Mme de Maré qu’on nomma une dame d’atours. Elle prétexta son âge, sa santé, son repos, sa liberté. Elle se retira donc avec les regrets de tout le monde, les nôtres surtout. Elle étoit ma parente et de tout temps intimement mon amie, et elle avoit beaucoup d’amis considérables, et plus de sens et de conduite encore que d’esprit. Elle eut des présents, deux mille écus de pension du roi, un logement au Luxembourg, et conserva le sien au Palais-Royal, ses établissements de Saint-Cloud et les douze mille livres d’appointements de M. le duc d’Orléans, avec le titre de gouvernante de ses filles, dont elle ne s’embarrassa plus des fonctions.

Nous ne fûmes pas longtemps sans découvrir la cause de son opiniâtre résistance à demeurer auprès de Mme la