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trop su qu’alléguer pour empêcher le roi de lui donner une place qu’il lui avoit destinée ; que néanmoins elle n’avoit rien oublié pour lui tenir parole jusqu’au bout, parce qu’il faut servir ses amis à leur mode et pour eux, non pour soi-même, ce fut son expression ; qu’au surplus elle l’avoit fait avertir de notre perte qu’elle voyoit certaine par un refus ; qu’elle étoit très-aise que nous nous fussions rendus capables de croire conseil là-dessus ; qu’enfin, puisque la chose étoit faite, elle ne pouvoit lui en dissimuler sa joie, d’autant plus librement que, encore une fois, elle lui répondoit avec vérité qu’elle avoit fait contre son gré tout ce qu’elle avoit pu jusqu’à la fin pour détourner cette place d’elle, uniquement pour lui tenir parole ; que maintenant que la chose avoit tourné autrement, elle en étoit ravie pour soi, pour la princesse auprès de laquelle on la mettoit, et pour elle-même, parce qu’elle croyoit que cela nous étoit bon et nous porteroit de plus en plus à des choses agréables et meilleures.

Tout ce long chemin se passa en pareilles marques de bonté et d’amitié, parmi lesquelles la princesse parlant toujours, Mme de Saint-Simon eut peine à lui en témoigner sa reconnoissance. Mme la duchesse de Bourgogne finit par lui dire qu’elle l’auroit menée chez le roi sans l’heure qu’il étoit, où elle étoit attendue à Meudon : Madame se mit à pleurer de joie en voyant entrer Mme de Saint-Simon chez elle. Elle l’avoit toujours singulièrement estimée, quoique sans autre commerce que celui d’une cour rare. Elle n’avoit pu se tenir de lui dire à un souper du roi, lorsque Mme de La Vallière fut dame du palais, qu’elle en étoit outrée, mais qu’elle avoit toujours bien cru qu’ils n’auroient pas assez bon sens pour lui donner cette place. Mme de Saint-Simon ne vit point M. [le duc] et Mme la duchesse d’Orléans chez eux, ils étoient déjà chez Mademoiselle, où elle les trouva. L’allégresse y fut poussée aux transports. Mademoiselle dit même en particulier