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à Paris, où elle devint riche par la succession de M. de Metz, qui jusqu’à la mort, lui dit et lui fit dire qu’il ne lui donneroit rien, et qui en même temps qu’il l’en persuadoit lui avoit tout donné, comme il parut par son testament. Les deux fils du premier et du second lit de Mme de Blansac ont été plus heureux que père et mère. Nangis est mort maréchal de France, chevalier de l’ordre et chevalier d’honneur de la reine avec toute sa confiance ; l’autre, outre ce grand bien de M. de Metz, enrichi par d’autres voies dont il n’a négligé aucune, a eu un brevet de duc, en épousant une fille du duc de La Rochefoucauld. Il me faut passer cette courte digression assez mal placée, mais dont je n’aurois su où placer mieux la singularité.

Revenant de Saint-Maur où nous avions passé presque la journée avec l’abbé de Verteuil, frère du duc de La Rochefoucauld que nous y avions mené, rentrant chez moi sur les sept heures du soir, je trouvai un billet de M. le duc d’Orléans qu’un de ses gens avoit apporté fort peu après midi, comme cela m’arrivoit souvent pendant ce Marly. Je n’ouvris le billet que lorsque, monté chez ma mère, j’y fus seul avec elle et Mme de Saint-Simon ; le dessus étoit de l’écriture de M. le duc d’Orléans, le dedans, fort court, de celle de Mme la duchesse d’Orléans, dont les trois premiers mots étoient ceux-ci : Veni, vidi, vici. Elle ajoutoit que je verrois bien que c’étoit M. le duc d’Orléans qui les avoit dictés, et sans en dire davantage, m’imposoit le secret jusqu’à la déclaration qui ne tarderoit pas. Après ma première effusion de joie, à laquelle, par un secret pressentiment, Mme de Saint-Simon ne prit qu’une part de complaisance, j’entrai en inquiétude du délai de la déclaration. Tandis que j’agitois ce qui pouvoit la retarder, on m’annonça un valet de pied de M. le duc d’Orléans qui, sans lettre me vint apprendre de la part de Mademoiselle la déclaration de son mariage, et qu’elle m’envoya dans l’instant qu’elle l’eut apprise, par le laquais que d’Antin lui avoit dépêché de