Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 8.djvu/261

Cette page n’a pas encore été corrigée

approché du roi, assuré des agréments de toutes les sortes. Elle s’étendit fort sur ces avantages qu’un homme de mon esprit pouvoit solidement pousser. Elle ajouta qu’il étoit flatteur que j’eusse été choisi pour l’ambassade de Rome, à l’âge où j’étois lors de ce choix ; et elle, au sien, regardée comme si convenable à la place dont il étoit à présent question, la première de la cour à remplir, puisque celle d’auprès d’elle n’étoit point vacante ; qu’on savoit si fort que nous ne voulions point aller à Rome ; que cela, joint avec notre dégoût pour la place de dame d’honneur dont il s’agissoit, irriteroit le roi, et lui feroit demander avec justice ce que nous voulions donc, puisque les deux premiers et plus considérables emplois pour homme et pour femme, enviés et désirés de toute la cour en tout âge, ne nous sembloient pas convenables à nous, et dans la situation d’âge et de fortune où nous nous trouvions ; que l’envie et la jalousie du monde en crieroit encore bien plus haut contre nous ; qu’enfin, nous nous avisassions bien, et que nous comprissions qu’un refus ne se pardonneroit point et nous romproit le cou pour jamais. Après les remercîments proportionnés à la bonté avec laquelle elle entroit dans toute la discussion de cette affaire, Mme de Saint-Simon convint qu’un refus nous noieroit en effet sans retour ; que c’étoit aussi pour l’éviter qu’elle s’adressoit à elle, puisque enfin nous étions fermement résolus au refus si les choses en venoient là. Après quelques autres propos plus généraux, Mme la duchesse de Bourgogne lui dit qu’elle ne voyoit point d’autre dame d’honneur à faire qui convînt, non-seulement à elle, mais à la place ; et le tout, après beaucoup d’amitiés, se termina à promettre enfin à Mme de Saint-Simon qu’elle tâcheroit d’empêcher que la place lui fût offerte, puisque elle et moi étions si obstinés au refus, qu’elle ne comprenoit pas ; que, néanmoins, il pourroit bien arriver que la chose se feroit sans elle, ou que, se faisant avec elle, elle ne seroit pas maîtresse de rien empêcher, mais qu’elle promettoit de