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bête de la princesse auprès de qui elle seroit mise ; et qu’elle ne s’y résoudroit jamais. Mme la duchesse de Bourgogne n’oublia rien, avec tout l’art et l’esprit possible, pour combattre ces raisons ; et finalement lui dit que Mademoiselle ayant père et mère et grand’mère à la cour, et elle par-dessus eux tous, ils se chargeroient de sa conduite et de celle de sa dame d’honneur.

Après quantité de raisonnements, Mme de Saint-Simon tint ferme. Elle lui avoua qu’elle craignoit encore que, si en exécutant ses ordres sur la conduite de la princesse et sur la sienne elle se brouilloit avec la future duchesse de Berry, elle n’en fût que peu approuvée ; et que la princesse ensuite en faisant mieux, ou tournant les choses d’une autre façon auprès d’elle, elle-même enfin par douceur, par complaisance, par amitié pour Mme sa belle-soeur, ne vint à la blâmer elle-même, et à se refroidir d’estime et de bonté pour elle. À cette nouvelle difficulté Mme la duchesse de Bourgogne opposa les protestations d’un côté, les reproches de l’autre, de la croire capable de cette faiblesse et de cette légèreté. Après avoir fort insisté là-dessus, elle mit le doigt plus particulièrement sur la lettre, et lit entendre qu’elle comprenoit bien qu’elle et moi trouvions cette place au-dessous de nous, sur quoi Mme de Saint-Simon s’étant modestement et brèvement étendue [1], Mme la duchesse de Bourgogne lui dit qu’il falloit vivre selon les temps ; que d’ailleurs, quant à présent, elle et sa belle-soeur seroient égales en rang et en toutes choses. Après avoir quelque temps battu là-dessus, et avoué pourtant ce que Mme de Saint-Simon en avoit dit, elle lui représenta notre situation à la cour, les ennemis que j’y avois, les espèces de disgrâces que j’avois essuyées, avec combien de temps et de peine j’en étois sorti ; que cette place y seroit un puissant bouclier, un chemin facile de me mieux faire connoître, d’être plus

  1. Nous avons reproduit fidèlement le texte du manuscrit, quoique le mot étendue paraisse inexact ; les précédents éditeurs l’ont remplacé par défendue.