Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 8.djvu/242

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Je n’y gagnai rien. Après avoir longtemps disputé, il nous dit franchement qu’il n’avoit ni le front ni le courage de parler, et que, s’il le faisoit dans cette disposition, ce seroit si mal qu’il ne feroit que gâter son affaire. Toutefois sans cela elle ne se pouvoit amener au delà des termes où elle se trouvoit conduite, et il s’agissoit de la bâcler sous peine de la manquer sans retour. Réduite en ces termes, et Mme la duchesse d’Orléans, pour ainsi dire pétrifiée de surprise et de douleur, je pris mon parti ; ce fut de proposer à M. le duc d’Orléans, puisqu’il étoit fermé à ne point parler au roi, au moins de lui écrire et de lui rendre sa lettre lui-même. Cette proposition rendit la vie et la parole à Mme la duchesse d’Orléans, qui applaudit à cet avis qu’elle-même avoit mis en avant d’abord à la proposition de parler, et j’y avois résisté comme beaucoup plus foible que la parole, et j’y étois revenu lorsque je ne vis point d’autre ressource. Pour Mme la duchesse d’Orléans, elle crut toujours qu’une lettre qui demeuroit, et qui se pouvoit relire plus d’une fois dans un intérieur de gens favorables, valoit mieux que le discours. Le succès montra qu’elle avoit raison. M. le duc d’Orléans y consentit. Je craignis ses réflexions, et je le pressai d’écrire sur-le-champ. Il logeoit toujours en bas du premier pavillon du côté de la chapelle, avec M. le Prince ou M. le prince de Conti en haut, après leur mort avec M. de Beauvilliers. Le voyage suivant cela fut changé. Il eut pour toujours un logement au château, en haut, de suite de celui de Mme sa femme, où, pour le dire en passant, il n’y avoit eu au château d’hommes logés que les fils de France, et le capitaine des gardes en quartier, et aucune femme mariée que les filles de France et enfin Mme la duchesse d’Orléans. Tant que le roi vécut cela ne fut point autrement, sinon en faveur de M. et Mme la duchesse d’Orléans.

Comme M. le duc d’Orléans sortoit, Mme la duchesse d’Orléans me dit d’un air peiné : « Allez-vous le quitter ? » puis : « N’écrirez-vous point ? » Elle vouloit que je fisse la