Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 8.djvu/208

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sera pour vous seul, s’il vous plaît ; et la confiance qu’une longue et douce habitude me commande d’avoir en vous, jointe à celle que vous avez de garder impénétrablement les plus grands secrets de l’État, me fait compter sans crainte que vous ne me garderez pas celui-ci moins religieusement que vous faites ceux-là, puisque vous jugez bien vous-même qu’il m’est d’une importance infinie.




CHAPITRE X.


Crayon de Mgr le duc de Bourgogne pour lors. — Succès de ce Discours. — Intrigue du mariage de M. le duc de Berry. — Obstacles contre Mademoiselle. — Causes de ma partialité sur ce mariage. — Fondement de ma détermination de former une cabale pour Mademoiselle. — Duc et duchesse d’Orléans. — Duc et duchesse de Bourgogne. — Duchesse de Villeroy. — Mme de Lévi. — M. et Mme d’O, par ricochet. — Duc du Maine, par ricochet. — Ducs et duchesses de Chevreuse et de Beauvilliers. — Jésuites. — Noeud intime de la liaison du P. Tellier avec les ducs de Chevreuse et de Beauvilliers. — Maréchal de Boufflers.


Une courte anatomie de ce Discours ne sera pas inutile pour la suite. Il faut dire d’abord que Mgr le duc de Bourgogne étoit né avec un naturel à faire trembler. Il étoit fougueux jusqu’à vouloir briser ses pendules lorsqu’elles sonnoient l’heure qui l’appeloit à ce qu’il ne vouloit pas, et jusqu’à s’emporter de la plus étrange manière contre la pluie quand elle s’opposoit à ce qu’il vouloit faire. La résistance le mettoit en fureur : c’est ce dont j’ai été souvent témoin dans sa première jeunesse. D’ailleurs un goût ardent le portoit à tout ce qui est défendu au corps et à l’esprit. Sa