Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 8.djvu/169

Cette page n’a pas encore été corrigée

façon à ne vouloir pas le montrer, et il fut ravi de cette sottise du comte de Roucy et du bruit qu’elle fit dans un peuple ignorant et jaloux de tout. Il la saisit, et ne pouvant faire pis à M. de Metz, il le châtia cruellement de la sorte, sous prétexte de ne rien précipiter, et d’un éclaircissement qu’il n’avoit garde de prendre, mais dont il pouvoit faire durer le prétexte tant qu’il lui plairoit, et par conséquent le désespoir de M. de Metz, qui en tomba malade, et à qui, réellement et de fait, la tête en pensa tourner et en fut fort près. Son fait que voici étoit double.

Le roi, après avoir fort aimé le cardinal de Coislin et eu pour lui jusqu’à sa mort une estime déclarée qui alloit, et très-justement, jusqu’à la vénération, se laissa depuis aller au P. Tellier, qui, pour fourrager à son plaisir le diocèse d’Orléans, de concert en cela avec Saint-Sulpice, persuada au roi que ce cardinal étoit janséniste, et qu’il avoit mis en place dans son diocèse tous gens qu’il en falloit chasser. C’étoient des hommes du premier mérite en tout genre, et connus et goûtés comme tels, et qui étoient fort attachés au cardinal. Ils furent chassés et quelques-uns exilés. Tout le diocèse cria. Cela aigrit les persécuteurs qui avoient Fleuriau, évoque d’Orléans, à leur tête. Ils firent ôter la tombe du cardinal, parce qu’on s’étoit accoutumé à y aller prier ; et on empêcha avec violence ce pieux usage qui avoit commencé dès sa mort, et qui n’étoit qu’une suite de la constante réputation de toute sa vie. M. de Metz qui avoit protégé tant qu’il avoit pu ces ecclésiastiques chassés et exilés, perdit toute patience à l’enlèvement de la tombe de son oncle, surtout après en avoir fortement et inutilement parlé au roi. Il s’échappa en propos qui furent rapportés et envenimés, et par ceux qu’ils regardoient le plus, et qui mirent le roi de part dans leur querelle et dans leur ressentiment. L’autre point de M. de Metz fut que, s’étant trouvé un jour avec le duc de La Rocheguyon, le duc de Villeroy et MM. de Castries, qu’on commençoit à découvrir tout à fait la