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avec M. du Maine, et qu’elle désiroit savoir aussi ce qu’il me sembloit du rang qui venoit d’être donné à ses enfants. À mon tour je fus curieux où Mme la duchesse de Bourgogne avoit pris cette liaison, et ce qui la pouvoit mettre en doute sur ce que je pensois sur ce rang. Mme de Nogaret me dit que, veillant le soir précédent chez Mme la duchesse de Bourgogne encore en reste de couche du roi, et parlant de ce rang avec le scandale qu’il mérite, elle lui avoit dit que le roi, peiné de sentir combien peu elle goûtoit cette nouveauté, lui avoit exagéré l’approbation unanime ; que le duc du Maine étoit comblé des honnêtetés de la cour, et, que prenant ensuite un air plus ouvert et d’entière complaisance, il avoit ajouté qu’enfin moi-même j’avois visité le duc du Maine et l’avois assuré du plaisir que je ressentois de sa satisfaction. Je souris avec un dépit amer de la prostitution de mon nom pour soutenir celle de toute la France. Je contai à Mme de Nogaret ce qui m’étoit arrivé avec Mme la duchesse d’Orléans et M. du Maine avant la mort de M. le Duc sur le procès de la succession de M. le Prince, la conduite de M. et de Mme du Maine avec Mme de Saint-Simon, et avec moi, et la nôtre avec eux ; de là je m’expliquai avec elle de ce que je pensois et sentois d’un rang que je détestois dans le père, à plus forte raison continué dans ses enfants ; je m’étendis sur ce qu’elle et les deux princes héritiers en marquoient, et sur les raisons qui m’avoient forcé à aller chez M. et Mme du Maine à cette occasion pour la première fois de ma vie de cette sorte, où quoi que le roi en crût, M. du Maine n’avoit pu entendre le son de ma voix ; et je priai Mme de Nogaret de rendre toute cette conversation à Mme la duchesse de Bourgogne, ce qu’elle fit fort exactement.

Cependant la princesse pressée par Mme de Maintenon sur ce rang, demeura ferme et la surprit d’autant plus, qu’elle ne se doutoit pas qu’elle sût rien de ces matières-là, et qu’elle la trouva instruite de fort bonnes raisons, et qui l’embarrassèrent. Elle voulut absolument savoir d’elle ce qui