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M. le Duc, en manteau, reçut aussi les visites dans l’appartement de feu M. le Duc. Il y avoit à la porte de l’un et de l’autre des piles de mantes de deuil et de manteaux longs, desquels personne ne fut exempt. Ceux qui en avoient de chez eux et ceux qui n’en prirent qu’à la porte, hommes et femmes, en usèrent avec la même affectation d’indécence qu’on avoit marquée aux visites de la mort de M. le Prince. M. le Duc ni Mme la Duchesse ne firent pas semblant de s’en apercevoir. M. le Duc reçut tout le monde debout, et conduisit exactement tous les ducs et tous les princes étrangers jusqu’à la dernière extrémité de son appartement. M. du Maine, de même qu’on vit aussi en manteau, et Mme du Maine en mante, et qui y furent aussi légers sur l’indécence affectée des accoutrements que M. le Duc et Mme la Duchesse. Mlles ses filles en mante étoient dans sa chambre, qui conduisirent toutes les duchesses et les princesses étrangères à la porte de la chambre, et Mme de Laigle, dame d’honneur de Mme la Duchesse, au bout de l’antichambre.

Depuis l’affaire de Mme de Lussan, je n’avois eu aucun lieu de me plaindre de Mme la Duchesse. Ce qui lui étoit échappé alors, elle l’avoit hautement nié. Elle avoit fort affecté de faire toutes sortes d’honnêtetés à Mme de Saint-Simon, lorsque nous ne la voyons point, toutes les fois qu’elle l’avoit rencontrée, et à elle, sur moi. Lorsque nous la vîmes sur la mort de M. le Prince, elle en avoit redoublé. Elle n’avoit eu aucune part à la noirceur de feu M. le Duc sur moi absent, lors de la mort de M. le Prince et de l’affaire des manteaux, qui nous avoit fait cesser encore une fois de les voir. Nous crûmes donc devoir laisser toute l’iniquité sur feu M. le Duc seul, et nous priâmes Mme de Laigle de lui dire que ç’avoit été sur le compte de feu M. le Duc que nous ne l’avions point vue à sa dernière couche, avec les propos convenables. Mme de Laigle étoit fille de M. de Raré qui, avec toute sa famille, avoit toujours [eu] un grand attachement