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Le roi exposa le fait, ce que M. le duc d’Orléans lui avoit dit dans la journée, Mme de Maintenon ce qu’il lui avoit écrit ; ils convinrent tous qu’il falloit décider. Le roi, qui n’avoit pas relu les mémoires, étoit plein d’un dernier que feu M. le Duc lui avoit donné depuis peu de jours. Il en avoit voulu donner la communication à M. le duc d’Orléans et la liberté d’y répondre ; sa paresse et sa négligence lui persuadèrent que l’un et l’autre étoit inutile, que ce ne pouvoit être que des redites et qu’il n’avoit pas besoin de rien ajouter aux mémoires qu’il avoit donnés. Ainsi il ne vit point ce dernier mémoire qui pourtant avoit persuadé le roi contre la prétention de Mademoiselle. Il montra un peu ce penchant, mais il laissa toute liberté de discuter l’affaire et d’opiner, parce que, dans la vérité, il ne se soucioit guère qui de ses deux bâtardes l’emportât. Monseigneur, de longue main bien instruit et de nouveau recordé, qui haïssait M. le duc d’Orléans à ne s’en pas contraindre, qui y étoit sans cesse entretenu, qui aimoit Mme la Duchesse, opina de toute sa force pour les femmes des princes du sang. Mgr le duc de Bourgogne, sur lequel de plus anciens et de plus solides principes que ceux des mémoires respectifs faisoient impression, appuya le même avis. On peut ne pas douter que M. le duc de Berry n’en ouvrit pas un autre. La décision arrêtée, le roi considéra qu’en ayant fait une pour la préséance de ses filles sur Madame qu’il ne vouloit pas changer, et désirant aussi donner quelque consolation à Mme la duchesse d’Orléans, fit l’honnêteté à M. le duc de Berry de lui demander s’il n’auroit point de peine de céder aux filles de Mgr le duc de Bourgogne, qui tout de suite répondit qu’il n’en auroit point. Ainsi il fut arrêté que les filles de France non mariées précéderoient, excepté la Dauphine ou la fille de France directe, les femmes de leurs frères cadets ; mais que les petites-filles de France, filles, seroient précédées par les femmes des fils de France, que par conséquent Mme la duchesse d’Orléans seroit assurée de précéder les filles de M. le duc