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— Mort du président Molé. — Mort, fortune et caractère de la maréchale de La Mothe et de son mari. — Mort de la duchesse d’Holstein ; sa postérité et ses prétentions. — Mort du prince Georges de Danemark. — Voyage oublié du prince royal de Danemark en France, qui pensa perdre Broglio, qui lors commandoit en Languedoc, et est mort maréchal de France. — Projet de la reprise de Lille avorté. — Froid extrême et ruineux. — Vendôme exclu de servir. — Deux cent mille livres de brevet de retenue au duc d’Harcourt sur sa charge de Normandie. — Pensions de la duchesse de Ventadour. — Grâces pécuniaires à Mlle de Mailly. — Accidents de La Châtre ; son caractère. — Prié plénipotentiaire, puis ambassadeur de l’empereur à Rome ; sa fortune, son caractère. — Embarras et conduite de Tessé à Rome. — Mort de Quiros ; sa fortune ; sa défection.


Dès en arrivant à Douai, Boufflers se mit à rassembler une armée. Il y fut tôt après suivi des officiers généraux qu’on y envoya, et de tous les colonels qui, à leur retour, avoient salué le roi et en avoient été bien reçus. Boufflers, quoique tout occupé de l’exécution du grand projet de reprendre incontinent Lille, ne laissoit pas de songer à délivrer Gand, en tombant sur les quartiers des ennemis séparés les uns des autres par les rivières ; mais c’est bien dit qu’il y songea, car il n’eut pas même le temps d’y travailler. La tête tourna à La Mothe ; car il étoit entièrement incapable de lâcheté et d’infidélité, et il n’avoit qu’à mériter le bâton par une telle défense, sûr de l’obtenir. Il se laissa empaumer par un capitaine suisse qui eut peur pour sa compagnie et peut-être aussi pour sa peau, qui lui persuada si bien de se rendre au bout de trois jours de tranchée ouverte qu’il capitula, et sa garnison de vingt-neuf bataillons et de plusieurs régiments de dragons sortit tout entière le 29 décembre, et fut conduite à Gand. Elle y laissa quatre-vingt milliers de poudre, quatre mille mousquets de rechange et beaucoup de canon. Il n’y eut ni sédition, ni murmure des bourgeois, ni aucun coup de main depuis l’investiture jusqu’à la capitulation. La Mothe surprit extrêmement les chefs des corps