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fils est depuis devenu chancelier de France, avec diverses fortunes. De ce mariage sortirent trois fils appelés à la substitution de Mlle d’Armentières.

L’aîné, brave homme et honnête homme, mais sans la moindre trace d’esprit que l’éducation n’avoit pu réparer, se battit contre Pertuis dans leur première jeunesse, et [ils] furent tous deux enfermés quinze ou seize ans durant dans une citadelle. Les deux cadets se trouvèrent avoir beaucoup d’esprit, et de désir de se relever, malgré leur pauvreté et l’obscurité où ils se trouvoient. L’aîné des deux fut envoyé enfant, et sans pain, page du grand maître de Malte, le cadet s’intrigua comme il put et servit de même. Tous deux, à force de vouloir, firent des connoissances, et s’ornèrent l’esprit à force, de lecture, dans laquelle ils acquirent beaucoup. La maréchale de Chamilly, qui les connut à La Rochelle, où ils servoient, les prit en amitié, les attira chez elle à Paris, où ils virent la bonne compagnie, dont ils surent profiter. Ils firent une autre connoissance que cette maréchale ne leur procura pas, mais qui devint le fondement de leur fortune : ce fut [celle] de Mme d’Argenton. Elle les trouva de si bonne compagnie qu’elle les présenta à M. le duc d’Orléans, avec qui elle les fit souper chez elle, et leur acquit sa familiarité. Il vaqua chez lui une place de chambellan qu’il procura à Conflans, et bientôt après une autre à d’Armentières qui sortoit de sa prison. Ils se firent des amis au. Palais-Royal ; Armentières, par le même crédit, devint maître de la garde-robe.

Mme de Jussac, dont j’ai parlé lorsqu’on la mit sans titre auprès de Mme la duchesse d’Orléans qu’elle a voit élevée, et qui l’aimoit passionnément, avoit une fille mariée à M. de Chaumont, du nom d’Ambly, qui avoit un régiment. Elle en avoit une autre fort jolie, dont elle voulut aussi se défaire, mais son bien étoit fort court. Son bonheur fit que Sassenage, premier gentilhomme de la chambre de M. le duc d’Orléans, revenu malade d’Espagne, fort dégoûté de