Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 6.djvu/396

Cette page n’a pas encore été corrigée

Mons-en-Puelle pour discuter le pour et le contre de l’attaque des ennemis, et si le pour l’emportoit, les moyens et la manière de la faire ; que d’O et Gamaches bonnetèrent [1] : les officiers généraux leur représentèrent avec autorité qu’il s’agissoit beaucoup moins de la conservation de Lille que de celle des princes ; qu’intimidés de la sorte, M. de Vendôme fut le seul pour l’attaque ; que Mgr le duc de Bourgogne, qui étoit d’abord de cet avis, se rendit à l’opinion uniforme des officiers généraux ; que M. le duc de Berry maltraita un peu le duc de Guiche en ce conseil ; que le duc de Berwick se déclara aussi pour la négative ; que ce fut en conséquence de ce qui s’étoit passé en ce conseil que le courrier avoit été dépêché pour consulter encore une fois le roi et recevoir ses derniers ordres ; que Vendôme y avoit parlé aigrement et fortement, mais en général, et qu’en sortant de l’assemblée il avoit traité d’O et Gamaches durement. Il est inconcevable avec quelle célérité cette nouvelle fut répandue, fut reçue, pénétra tout, révolta tout le monde, et fit de bruit et de désordre. La cour, Paris, les provinces en retentirent. D’O et Gamaches y passèrent pour avoir agi dans l’esprit et le désir de Mgr le duc de Bourgogne, sans lequel ils n’eussent osé d’eux-mêmes se charger d’une commission si dangereuse, si honteuse, si importante, d’où résultèrent des cris et des clameurs sans retenue aussi tristes contre Mgr le duc de Bourgogne, que flatteurs pour le duc de Vendôme. Toutefois ce qu’il y eut de véritable est qu’il ne fut non seulement pas la moindre question de conseil de guerre, mais pas même mention de consulter personne. Bien est-il vrai que la cabale que Vendôme avoit dans l’armée fit si bien qu’elle persuada généralement toutes les troupes, mais sans dire un mot de ce conte imaginaire de conseil de guerre, que le duc de Vendôme et les siens seuls vouloient combattre, que Mgr le duc de Bourgogne s’y opposoit ;

  1. Opinèrent du bonnet, sans parler.