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l’autre de jeter du secours dans Lille qui le pouvoit aisément recevoir par le côté de la citadelle, tandis qu’on tenoit les ennemis de si près. Ce dernier parti étoit l’avis de tous les généraux, celui de laisser consumer aux ennemis leurs munitions et leurs vivres, de les jeter dans la nécessité des convois, et d’attendre de leur impuissance ce qui ne s’en pouvoit espérer par la force.

M. de Vendôme, qui avoit tant hésité et retardé pour s’ébranler, qui, ferme pour le chemin de Tournai, ensuite pour longer la Marck, avoit si nettement déclaré qu’il seroit d’avis de mûres délibérations lorsqu’il seroit question des moyens et de la manière du secours, ne s’en souvint plus dès qu’on en fut là. Il maintint fort et ferme qu’il falloit attaquer ; ses dépêches ne chantoient que bataille et victoire, ses chiens de meute ne publioient autre chose, tandis qu’ayant pu si commodément passer la Marck près de Tournai, il avoit constamment refusé d’abréger huit journées, et beaucoup de peine et de fatigues, se porter de plain-pied dans un pays ouvert et tout proche de Lille, préféré les inconvénients dont il se trouvoit maintenant enveloppé sur la seule crainte de trouver les ennemis au-devant de lui avant d’être suffisamment déployé devant eux, sur la seule confiance de les écraser à force d’artillerie qui lui en fit aller chercher le renfort de Saint-Hilaire par le long détour qu’il voulut prendre. Mais parlons ici franchement. Rien de tout cela ; mais le second tome d’Audenarde, mais plus pourpensé. La même lenteur et la même opiniâtreté à s’ébranler, la même ruine par la perte d’un temps précieux, ne rien faire quand il pouvoit tout faire, vouloir tout quand il ne pouvoit plus rien, et qu’il le sentoit mieux que personne. Ainsi voulut-il passer la nuit comme on étoit après le combat d’Audenarde, et le recommencer le lendemain, quoiqu’il vît ce dessein insensé et impraticable ; ainsi publia-t-il qu’il eût battu les ennemis si on l’eût voulu croire, pour affubler Mgr le duc de Bourgogne du dommage et de