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Le roi Auguste, qui n’avoit point de troupes en Flandre, vint incognito à l’armée des ennemis. Le prince Eugène fit le siège, et ouvrit la tranchée le 23 août. Le duc de Marlborough commandoit l’armée d’observation. Il passa l’Escaut pour se mettre en situation d’empêcher la jonction du duc de Berwick avec Mgr le duc de Bourgogne, dont l’armée étoit toujours en son même camp de Lawendeghem. Tandis qu’on étoit tout occupé de ces intéressantes nouvelles à Fontainebleau, Albéroni y arriva sans y être attendu et mit pied à terre chez Chamillart. Il y passa vingt-quatre heures, ne vit ni le roi ni le monde, et s’en retourna tout court. On peut juger de la curiosité qu’il donna à tout le monde, et de tous les raisonnements qui se firent. Était-il secrètement mandé ? était-ce réprimande ? était-ce envoi, excuses personnelles ou éclaircissements des faits passés ? Mais rien de tout cela, pas même raisonnements sur les affaires de Flandre. Le duc de Parme tremblant, mais fort désireux de la ligue d’Italie, avoit pris cette voie pour la presser, pour offrir tout ce peu qu’il pouvoit faire, pour entrer dans des détails bientôt discutés quand on parle, mais qui sont sans fin quand on écrit. Ce fut là le vrai sujet du voyage d’Albéroni. Mais de croire qu’entre lui et Chamillart, il n’y eut point quelque, épisode de Flandre, et qu’il ne vit point en secret M. du Maine, M. de Vaudemont, et les plus importants de la cabale, je pense que ce seroit fort se tromper. Quatre ou cinq jours après, le roi partit de Fontainebleau le lundi 27 août, pour aller coucher à Petit-Bourg et le lendemain à Versailles.

Le roi témoigna ne vouloir rien épargner pour se conserver une place aussi importante que Lille, et qui étoit personnellement une de ses premières conquêtes. Il parut surpris de la tranquillité de son armée toujours derrière le canal de Bruges, dans ce même camp où elle étoit venue d’Audenarde. Il y dépêcha un courrier avec un ordre positif de marcher au secours. M. de Vendôme le renvoya avec