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La duchesse de Châtillon mourut. C’étoit Mlle de Royan, fille d’une sœur de la princesse des Ursins, et La Trémoille comme elle, qu’elle avoit élevée et mariée chez elle à Paris, dont j’ai parlé à propos de mon mariage. Elle étoit devenue extrêmement grasse, et le roi l’avoit fait prier de ne venir point à la cour quand Mme la duchesse de Bourgogne auroit des soupçons de grossesse ; ni quand elle seroit grosse. Elle avoit acquis, en contrefaisant une religieuse du couvent où elle avoit été avant de venir chez sa tante, un tic rare et peu perceptible jusqu’à quelque temps après son mariage, et qui depuis s’étoit augmenté à un point qu’à toutes minutes son visage se démontoit à effrayer, sans qu’elle-même s’en aperçût le plus souvent par la continuelle habitude.

La femme de Razilly mourut aussi, et ce fut une perte pour son mari et pour sa famille, qui étoit fort nombreuse.

Le duc d’Aumont, qui avoit beaucoup mangé et qui n’étoit pas d’humeur à s’en contraindre, maria Villequier, son fils unique, à la fille unique de Guiscard, à qui Langlée, frère de Mme de Guiscard, avoit laissé un grand bien. Guiscard, outre l’honneur de cette alliance, s’accrocha volontiers à M. d’Aumont. Il étoit en disgrâce depuis Ramillies, et celle du maréchal de Villeroy ne lui promettoit pas sitôt la fin de la sienne. Villequier, avec tout ce bien, trouvoit des assaisonnements fâcheux : un beau-père disgracié, et ses deux frères roués ou pendus en effigie, passés aux ennemis, et qui faisoient parler bien mal d’eux en attendant une fin qui fut encore plus triste.

L’empereur avoit fait le mariage avec le roi de Portugal d’une de ses soeurs, qu’un frère de M. de Lorraine éonduisoit à Lisbonne ; et de l’archiduc son frère avec une princesse de Brunswick-Blankenbourg-Wolfenbüttel, conduite par le prince Maximilien d’Hanovre. Toutes deux étoient en voyage, et cette dernière avoit passé Milan, où on lui avoit