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Marly, une femme qu’il n’avoit jamais vue, et qui se tortilloit en prétentions. Vaudemont et ses nièces arrivèrent le samedi à Marly.

Dans le dimanche, Mme de Maintenon fit agréer au roi que, allant elle à Saint-Cyr le mercredi, comme elle y alloit de Marly presque tous les jours, que celui-là même Mme de Vaudemont l’y viendroit voir de Paris ; que, sans que Mme de Vaudemont lui parlât de Marly, ce seroit elle qui lui proposeroit de l’y mener. Le roi y consentit, puis se ravisa, enfin il l’accorda, et ce qui avoit été réglé pour le mercredi ne s’exécuta que le vendredi. Le roi, entrant le soir chez Mme de Maintenon, y trouva Mme de Vaudemont qui arrivoit avec elle. L’accueil fut gracieux, mais court ; elle ne soupa point, à cause du maigre. Le lendemain elle fut présentée à Mme la duchesse de Bourgogne, comme elle alloit partir pour la messe, et vit un instant Monseigneur et Mgr le duc de Bourgogne chez eux, puis les princesses fort uniment, mais fort courtement. Elle fut l’après-dînée, avec le roi et presque toutes les dames, voir la roulette, où Mme la duchesse de Bourgogne alloit, puis à une grande collation dans le jardin. Mme de Vaudemont ne fut pas, à beaucoup près, si fêtée que son mari. Elle demeura trois jours à Marly, et s’en alla le mardi à Paris. Elle revint sept ou huit jours après à Marly passer quelques jours, et se hâta ensuite de regagner Commercy, peu contente de n’y avoir pu rien usurper en rang et en préférences.

C’étoit une personne tout occupée de sa grandeur, de ses chimères, de sa chute du gouvernement du Milanois ; elle l’étoit aussi de sa santé, mais beaucoup moins en effet que comme chausse-pied ou couverture ; tout empesée, toute composée, tout embarrassée, un esprit peu naturel, une dévotion affichée, pleine d’extérieur et de façons ; en deux mots, rien d’aimable, rien de sociable, rien de naturel ; grande, droite, un air qui vouloit imposer, et néanmoins être doux, mais austère et tirant fort sur l’aigre-doux. Personne