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poudre, et grande quantité de farine et d’avoine. Tout ce dépôt étoit destiné à faire le siège de Phalsbourg. Villars s’étendit tout à son aise, et n’oublia pas les contributions jusque dans la plaine de Mayence.

Le roi d’Espagne étoit parti à la fin de février dans le dessein de réduire le royaume de Valence ; mais sur les ordres du roi, pour ne différer pas le siège de Barcelone, il changea sa marche et arriva le 3 devant Barcelone, où il trouva Legal arrivé de la veille avec toutes les troupes françaises, et tous nos bâtiments qui débarquoient tout ce qu’il falloit pour le siège ; d’autres bâtiments portèrent toute la garnison de Girone dans Barcelone avec toutes sortes de rafraîchissements, où plus de dix mille hommes animés de la présence de l’archiduc prirent les armes et se joignirent à la garnison. La tranchée fut ouverte la nuit du 5 au 6, par le marquis d’Ayetone, mais le canon ne tira que le 12, encore fort faiblement. Le duc de Noailles, qui devoit y servir de maréchal de camp, tomba malade de la petite vérole qui fut très heureuse, et qui acheva de le guérir de tous ses maux. Laparat, ingénieur principal, et le chef des autres depuis l’élévation de Vauban au bâton, étoit chargé de ce siège, et y fut tué le 15 avril en allant reconnoître des ouvrages qu’il vouloit faire attaquer.

On prétendit qu’on fit une grande faute d’avoir attaqué par le mont Joui ; que cette fortification séparée de celle de la ville seroit tombée avec la ville, au lieu que sa prise n’influoit point sur celle de la place. Quoi qu’il en soit, ce mont Joui dura le double de ce qu’on avoit cru, consuma beaucoup de nos munitions et coûta bien d’honnêtes gens, et Laparat même, qui y fut tué et qui fut mal remplacé. Les troupes qui faisoient le siège étoient peu nombreuses ; leur fatigue étoit continuelle ; il n’y avoit de repos que de trois nuits l’une, et fort souvent beaucoup moins. Les petits combats y étoient continuels avec les miquelets qui troubloient les convois, et qui assiégeoient tellement les assiégeants