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La nouvelle de cette étrange célébration de mariage ne tarda guère à se répandre avec tout le ridicule dont elle étoit tissue.

Le roi trouva très mauvais qu’on eût osé passer ses défenses. Les Lorrains, accoutumés de tout oser, puis de tout plâtrer, et à n’en être pas plus mal avec le roi, eurent la même issue de cette entreprise ; ils s’excusèrent sur la crainte d’un affront, et il pouvoit être que M. de Mantoue, amené à leur point à force de ruses, d’artifices, de circonventions, n’eût pas mieux aimé que de gagner l’Italie, puis se moquer d’eux. Ils aimèrent donc mieux encourir la honte qu’ils essuyèrent en courant, et forçant M. de Mantoue, que celle de son dédit, accoutumés comme ils sont à tant d’étranges façons de faire des mariages. De Lyon Mme de Pompadour revint pleine d’espérance de l’ordre pour son mari à la recommandation du duc de Mantoue, qui n’eut aucun succès.

Mme d’Elbœuf et sa fille allèrent s’embarquer à Toulon sur deux galères du roi, par une mescolance[1] rare d’avoir défendu à Mme d’Elbœuf de penser à ce mariage, ou l’équivalent de cela, de n’avoir voulu dans la suite, ni le permettre, ni le défendre, ni s’en mêler, d’avoir défendu après qu’il se fît en France, et de prêter après deux de ses galères pour l’aller faire ou achever.

Ces galères eurent rudement la chasse par des corsaires d’Afrique. Ce fut grand dommage qu’elles ne fussent prises pour achever le roman.

Débarquées enfin à sauveté, M. de Vaudemont les joignit. Il persuada à M. de Mantoue de réhabiliter son mariage par une célébration nouvelle qui rétablît tout le défectueux de celle de Nevers. Ce prince l’avoit lui-même trouvée si contraire aux défenses précises que le roi leur avoit faites de se marier en France, qu’il l’avoit fait assurer par son envoyé qu’il n’en étoit rien, et que ce n’étoient que des bruits faux que ceux qui couroient de son mariage fait à Nevers ; cette

  1. Combinaison.