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et ne prétendit qu’à l’état de volontaire. Vendôme ne lui fit pas la moindre civilité d’aucune déférence, et continua en sa présence à donner l’ordre et à commander, comme si Tessé n’y eût pas été. C’étoit bien connoître le roi et le crédit de son intérieur, que d’en user ainsi après ce qu’il lui avoit si positivement ordonné au contraire, et en même temps faire peu de cas de son bâton et de soi, en comparaison de sa fortune, que toutefois, au point où il étoit arrivé, il pouvoit trouver être faite.

Peu de jours après, M. de Vendôme battit une partie de l’arrière-garde du comte de Staremberg, général des Impériaux : quatre cents hommes tués, cinq cents prisonniers, trois chariots remplis de pain firent du bruit à Versailles. M. de Vendôme assaisonna cette nouvelle de la promesse d’attaquer les ennemis le lendemain. Il savoit bien qu’il n’en feroit rien. Ses courriers étoient sans nombre, ou pour des bagatelles qu’il faisoit valoir et qui trouvoient des prôneurs, ou pour des assurances de choses qui ne s’exécutoient point et qui trouvoient leurs excuses dans les mêmes personnes, et le roi s’en laissoit persuader. M. de Vaudemont écrivit de Milan au roi sur cette bagatelle une félicitation, comme assuré que ses ennemis seroient incontinent chassés d’Italie. C’étoit la même cabale et les mêmes applaudissements : tout cela s’avaloit et réussissoit à merveille. Mais pour cette fois, M. de Vendôme fit encore quelque chose : il culbuta huit cents chevaux et six bataillons de l’arrière-garde de Staremberg dans l’Orba.

Bezons et Saint-Frémont, à la tête de notre cavalerie, et Albergotti avec quinze cents grenadiers, firent cette expédition. Elle ne fut pas sans perte et beaucoup de blessés. Il en coûta mille hommes aux Impériaux, tués ou pris.

Solari, qui commandoit ceux-ci, tué, et le prince de Lichtenstein pris fort blessé.

Tessé s’en étoit retourné à Pavie, d’où il regagna Milan, et au commencement de février s’en retourna commander en Savoie. En même temps La Feuillade fut fait lieutenant général