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d’être à Marly dans le salon et à ses promenades dans ses jardins tous les voyages, sans demander, mais aussi sans avoir jamais de logement : il louoit une chambre au village. Il reçut une fois à Versailles une grêle de bastonnade de quatre ou cinq Suisses qui l’attendoient sortant de chez M. le Grand, à une heure après minuit, et l’accompagnèrent, toujours frappant, tout le long de la galerie. Il en fut moulu et plusieurs jours au lit. Il eut beau s’en plaindre et le roi se fâcher, les auteurs se trouvèrent sitôt qu’ils ne se trouvèrent plus. Quelques jours auparavant, M. lé Duc et M. le prince de Conti avoient fait un souper chez Langlée, à Paris, après lequel il s’étoit passé des choses assez étranges. Le roi leur en lava la tête ; ils crurent bien être assurés d’en avoir l’obligation à Termes, et le firent régaler comme je viens de dire, incontinent après. Cela fit un grand vacarme ; mais on n’en fit que rire, et le roi fit semblant d’ignorer les auteurs. Il étoit vieux, brouillé avec sa femme, qui étoit fort peu de chose, et ne laissa qu’une fille religieuse, et un frère obscur, connu de personne et qui ne se maria point.

L’infante aînée de Portugal mourut bientôt après. Elle avoit huit ans, et, nonobstant ce peu d’âge, on avoit flatté la cour de Lisbonne que l’archiduc l’épouseroit.

Tessé, qui n’avoit servi que de chausse-pied en Dauphiné à La Feuillade, l’y avoit bientôt laissé en chef et s’en étoit allé à Milan. Il prévit en habile et bas courtisan que M. du Maine et Mme de Maintenon l’emporteroient tôt ou tard sur la fermeté que le roi lui avoit marquée en prenant ses derniers ordres contre le désir des bâtards, et leur compétence à établir avec les maréchaux de France ; il prévit de plus que, quoi qu’il pût arriver, cette protection pour lui étoit plus solide que le plaisir de prendre le commandement sur M. de Vendôme. Il n’en voulut pas perdre l’occasion : il prit celle d’une apparence d’action, s’en alla en poste seul et en carabin joindre M. de Vendôme ; mit dans sa poche sa commission pour commander l’armée et M. de Vendôme même,