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indiquoit qui elle vouloit. « Mais, monsieur, interrompit le roi encore du même ton haut et fâché, vous avez tenu des discours ? — Non, sire, lui dis-je, aucun. — Quoi, vous n’avez point parlé ?… » Et de ce ton élevé poursuivoit, lorsqu’en cet endroit j’osai l’interrompre aussi, et, élevant ma voix au-dessus de la sienne : « Non, sire, vous dis-je, et si j’en avois tenu, je l’avouerois à Votre Majesté, tout de même que je lui avoue que j’ai évité la quête à ma femme, et que j’ai empêché d’autres duchesses de l’accepter. J’ai toujours cru et eu lieu de croire que, puisque Votre Majesté ne s’expliquoit point là-dessus, qu’elle ignoroit ce qui se passoit, ou que, le sachant, elle ne s’en soucioit point. Je vous supplie très instamment de nous faire la justice d’être persuadé que les ducs, et moi en particulier, eussions pu penser que Votre Majesté le désirât le moins du monde, toutes se seroient empressées de le faire, et Mme de Saint- Simon, à toutes les fêtes, et si cela n’eût pas suffi de sa part à vous témoigner mon désir de vous plaire, j’aurois moi aussi plutôt quêté dans un plat comme un marguillier de village. Mais, sire, continuai-je, Votre Majesté peut-elle imaginer que nous tenions aucune fonction au-dessous de nous en sa présence, et une encore que les duchesses et les princesses font tous les jours encore dans les paroisses et les couvents de Paris, et sans aucune difficulté ? Mais il est vrai, sire, que les princes sont si attentifs à se former des avantages de toutes choses, qu’ils nous obligent à y prendre garde, surtout ayant refusé la quête une fois. — Mais ils ne l’ont point refusée, me dit le roi d’un ton plus radouci ; on ne leur a point dit de quêter. — Ils l’ont refusée, sire, repris-je fortement, non pas les Lorraines, mais les autres (par où je lui désignois Mme de Montbazon). La duchesse du Lude en a pu rendre compte à Votre Majesté, et l’a dû faire, et c’est ce qui nous a fait prendre notre parti ; mais comme nous savons combien Votre Majesté se trouve importunée de tout ce qui est discussion et décision, nous avons cru qu’il suffisoit