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deux Dauphines, Mme de Maintenon prenoit soin d’en faire avertir. Tant qu’il y a eu des filles de la reine ou de Mme la Dauphine, c’étoit toujours l’une d’elles. Après que les chambres des filles eurent été cassées, on nomma de jeunes dames, comme je viens de l’expliquer. La maison de Lorraine, qui n’a formé son rang que par des entreprises du temps de la Ligue, adroitement soutenue depuis et augmentée par son attention et son industrie continuelle, et, à son exemple, celles qui peu à peu se sont fait donner le même rang par le roi, attentives à tout, évitèrent imperceptiblement la quête pour se faire après une distinction, et prétendre ne point quêter, et s’assimiler, en cela comme en leurs fiançailles, aux princesses du sang. On fut longtemps sans y prendre garde et sans y songer. À la fin, la duchesse de Noailles, la duchesse de Guiche sa fille, la maréchale de Boufflers s’en aperçurent. Quelques autres aussi y prirent garde, s’en parlèrent et m’en parlèrent aussi. Mme de Saint-Simon se trouvant habillée aux vêpres du roi, un jour de la Conception qu’il n’y avoit point de grand’messe et que Mme la duchesse de Bourgogne avoit oublié de nommer une quêteuse, lui jeta la bourse au moment de quêter. Elle quêta, et nous ne nous doutions pas encore que les princesses songeassent à se fabriquer un avantage de ne point quêter.

Après que j’en fus averti, je me promis bien que les duchesses deviendroient aussi adroites qu’elles là-dessus, jusqu’à ce qu’il arrivât quelque occasion de rendre la chose égale. La duchesse de Noailles en parla à la duchesse du Lude qui, molle et craignant tout, se contentoit de hausser les épaules ; et il se trouvoit toujours quelque duchesse neuve et ignorante ou basse, qui de fois à autre quêtoit. Enfin la duchesse du Lude, poussée à bout par Mme de Noailles, en parla à Mme la duchesse de Bourgogne, qui, trouvant la chose telle qu’elle étoit, voulut voir ce que les princesses feroient, et à la première fête fit avertir Mme de