Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 4.djvu/114

Cette page n’a pas encore été corrigée

Tessé, devenu maréchal de France, ne se soucioit plus de sa charge de colonel général des dragons. Il la vendit quatre cent quatre-vingt mille livres au duc de Guiche, qui en étoit mestre de camp général, et se défit de cette dernière charge à Hautefeuille. Par même raison, Villars fit aussi de l’argent de la sienne de commissaire général de la cavalerie, et en eut gros du comte de Verrue que sa triste situation avoit banni depuis longtemps de son pays, et qui se voulut lier tout de bon au service de France.

M. de La Rochefoucauld obtint en même temps la survivance de la charge de premier valet de garde-robe du roi, qu’avoit Bachelier, pour son fils. Il aimoit extrêmement le père qui avoit été son laquais, et que de là il avoit poussé à cette fortune. Il faut dire aussi que ce Bachelier étoit un des plus honnêtes hommes qu’on pût voir, le plus modeste, le plus respectueux, le plus reconnoissant pour son maître. Il avoit conservé un crédit sur lui dont ses amis et le plus souvent encore ses enfants avoient besoin. M. de La Rochefoucauld aimoit bien mieux ses valets que ses enfants, et ruinoit ces derniers pour eux. Bachelier, se comporta toujours avec tant de droiture et d’attachement entre le père et les enfants, qu’ils l’aimoient presque autant que le père ; j’ai ouï M. de La Rocheguyon, et le duc de Villeroy, son ami intime, et son beau-frère en faire de grandes louanges, et quoique Bachelier fût devenu riche, jamais on n’a soupçonné sa probité. Son fils ne vaut pas moins. Il acheta de Bloin, après la mort du roi, sa charge de premier valet de chambre, et il y a apparence qu’après le premier ministre auquel il a pu résister, malgré la toute-puissance de ce cardinal, il figurera beaucoup dans l’intérieur des cabinets. Bientôt après M. de La Rochefoucauld eut trois cent mille livres de brevet de retenue sur ses charges, M. de La Rocheguyon, son fils, en avoit les survivances depuis longtemps : ce fut donc à ses dépens, à quoi il fut obligé de consentir.

La vieille Toisy, dont j’ai parlé à l’occasion du mariage de