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Prusse et la prétention sur la succession de Clèves, Berg, Juliers, etc., qu’il partagea enfin provisionnellement avec le palatin de Neubourg. Frédéric-Guillaume, électeur de Brandebourg, petit-fils de ce mariage, eut quelque pensée de faire ériger sa Prusse ducale en royaume, par l’empereur, sans pousser plus loin cette idée. Frédéric III son fils et son successeur la suivit davantage, et servit bien l’empereur Léopold en Hongrie et sur le Rhin, où il ouvrit la guerre de 1688, par les sièges de Kaiserswerth et de Bonn qu’il prit en personne. S’étant toujours depuis rendu nécessaire à l’empereur, il s’assura de lui sur son dessein, et dans cette conjoncture favorable où l’empereur cherchoit partout des troupes, de l’argent et des alliés pour disputer la succession d’Espagne, l’électeur donna un repas aux principaux de sa cour dans lequel il leur porta la santé de Frédéric III, roi de Prusse et électeur de Brandebourg, et se déclara roi de cette manière. Il fut aussitôt traité de Majesté par les conviés et par tout ce qui n’osa ou ne voulut pas se brouiller avec, lui, et s’alla bientôt après installer lui-même en cette nouvelle dignité à Koenigsberg par un nouvel hommage de toute la Prusse ducale. C’est le père de celui qui vient de mourir et le grand-père de celui d’aujourd’hui.

La conduite de l’empereur, le murmure des Hollandois, le silence profond de l’Angleterre, firent songer ici à se mettre en état de soutenir le testament partout. Tessé fut envoyé à Milan concerter avec le prince de Vaudemont les choses militaires, et choisi pour commander les troupes que le roi enverroit au Milanois aux ordres de Vaudemont. Celui-ci envoya bientôt après Colmenero, son confident et général d’artillerie, au Milanois, rendre compte au roi de toutes choses et presser l’envoi des troupes. On se mit aussi au meilleur ordre qu’on put par mer, et on fit partir un gros corps de troupes sous des officiers généraux pour passer au Milanois, partie par mer, partie par terre, M. de Savoie ayant accordé lé passage de bonne grâce.