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avoit toujours pris soin, qui ne quittoit jamais son appartement partout, et qu’elle élevoit sous ses yeux comme sa propre fille.

J’arrivai à Paris avec la plupart de ce qui avoit servi en Flandre et en Allemagne, et j’allai tout aussitôt à Versailles où la cour ne faisoit guère qu’arriver de Fontainebleau. Mme de Saint-Simon y avoit été tout le voyage fort agréablement, et le roi me reçut avec toute sorte de bontés. Je trouvai une petite tracasserie domestique, que je ne dédaignerai pas de mettre ici, comme l’entrée à des choses plus considérables, dont on aime à se souvenir des échelons, et qui expliquera aussi la cour naissante de la princesse sur qui tout le monde avoit les yeux, parce qu’elle faisoit déjà beaucoup l’amusement du roi et de Mme de Maintenon. La cour ne la voyoit que deux fois la semaine à sa toilette. Elle étoit donc renfermée avec ses dames, et le roi y en joignit quelques autres pour qu’elle ne vît pas toujours les mêmes visages, et c’étoit une extrême faveur pour celles qui eurent cette privance. Les duègnes furent les duchesses de Chevreuse, de Beauvilliers et de Roquelaure, la princesse d’Harcourt et Mme de Soubise ; quatre entre deux âges, dont trois comme nièces de la duchesse du Lude, qui furent les duchesses d’Uzès, de Sully, et Mme de Boufflers, et Mme de Beringhen, et deux autres duègnes qui, sans être mandées, avoient liberté d’y aller tant qu’il leur plaisoit : c’étoient aussi des favorites, Mmes de Montchevreuil et d’Heudicourt ; les autres n’y venoient que mandées. Les jeunes étoient trois femmes de secrétaires d’État, Mmes de Maurepas, de Barbezieux et de Torcy, et trois filles qui ne paraissoient en nul autre lieu qu’en ce particulier et chez leurs mères, Mlle de Chevreuse, Mlle d’Ayen et Mlle d’Aubigné. Les vieilles étoient peu mandées, et s’excusoient souvent, et c’étoit plutôt une distinction qu’une compagnie ; les autres étoient pour l’amusement et surtout pour les promenades. Le roi et Mme de Maintenon n’y vouloient rien