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qu’il s’agissoit, non d’affaires temporelles, mais de doctrines, et, après quelques débats assez forts, cela passa ainsi en faveur du premier ordre, et la fin de cette affaire fut la condamnation de cent vingt propositions extraites de ces livres par l’assemblée, en suite du beau rapport que lui en fit M. de Meaux.

Cette assemblée se tint à Saint-Germain quoique le roi d’Angleterre occupât le château. M. de Reims y tenoit une grande table et avoit du vin de Champagne qu’on vanta fort. Le roi d’Angleterre, qui n’en buvoit guère d’autre, en entendit parler et en envoya demander à l’archevêque, qui lui en envoya six bouteilles. Quelque temps après, le roi d’Angleterre, qui l’en avoit remercié, et qui avoit trouvé ce vin fort bon, l’envoya prier de lui en envoyer encore. L’archevêque, plus avare encore de son vin que de son argent, lui manda tout net que son vin n’étoit point fou et ne couroit point les rues, et ne lui en envoya point. Quelque accoutumé qu’on fût aux brusqueries de l’archevêque, celle-ci parut si étrange qu’il en fut beaucoup parlé, mais il n’en fut autre chose.

Les disputes de la Chine commençoient à faire du bruit sur les cérémonies de Confucius et des ancêtres, etc., que les jésuites permettoient à leurs néophytes et que les missions étrangères défendoient aux leurs ; les premiers les soutenoient purement civiles, les autres qu’elles étoient superstitieuses et idolâtriques. Ce procès entre eux a eu de si terribles suites qu’on en a écrit des mémoires fort étendus et des questions et des faits, et on en a des histoires entières. Je me contenterai donc de dire ici que les livres que les PP.

Tellier et Le Comte avoient publiés sur cette matière furent déférés à la Sorbonne par les missions étrangères, et qu’après un long et mûr examen, ils furent fortement condamnés, tellement que le roi, alarmé que la conscience de Mme la duchesse de Bourgogne fût entre les mains du P. Le Comte, qu’elle goûtoit fort et la cour aussi,