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C’étoit avec cela un grand homme, maigre, jaune comme un coing, et qui l’avoit été toute sa vie, et qui tout vieux qu’il étoit vouloit encore être galant.

Une femme de vertu et d’un vrai mérite mourut en même temps, veuve de Maulevrier, chevalier de l’ordre, frère de MM. Colbert et de Croissy. Elle était sœur de Mme de Vaubrun, Beautru en son nom, et fille de Serrant, autrefois chancelier de Monsieur. Elle laissa un fils, gendre du comte de Tessé, dont j’aurai occasion de parler, un autre fils, et une fille mariée à Médavy, mort chevalier de l’ordre, et enfin maréchal de France, sans enfants.

Biron, qui si longtemps depuis a fait une fortune complète en biens et en honneurs, et qui l’a toute sa vie attendue dans la plus dure indigence, perdit un père obscur, qui, après la mort de sa femme, qui étoit Cossé tante paternelle de la maréchale de Villeroy, épousa une servante avec laquelle il acheva de se confiner et n’en eut point d’enfants.

Le chevalier de Villeroy se noya dans la capitane[1] de Malte, qui coula à fond en attaquant un bâtiment turc de quatorze pièces de canon. Spinola étoit le général, qui se sauva seul avec le chevalier de Saint-Germain et deux matelots ; tout le reste fut noyé. Ce chevalier de Villeroy étoit beau et bien fait, et n’avoit nulle envie de faire ses caravanes ; mais le maréchal de Villeroy qui ne vouloit qu’un aîné, qui destinoit le second à l’Église pour en faire un archevêque de Lyon, et qui avoit fort gaillardement marié une fille en Portugal et cloîtré les autres, força ce troisième fils à partir et eut tout lieu de s’en repentir. J’avois été élevé avec lui et avec l’abbé son frère, qui ne le valoit pas à beaucoup près. Cela fit le raccommodement de la famille, brouillée depuis l’affaire, que j’ai racontée en son temps, qui obligea la princesse d’Harcourt, par ordre du roi, à demander

  1. La galère capitane étoit celle qui portoit le commandant de la flotte.