Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 2.djvu/180

Cette page n’a pas encore été corrigée

l’égard du dernier, et qui portoit sur tous les deux. Ils se séparèrent donc fort contents de part et d’autre, et ils firent depuis, dans toutes les suites de cette affaire, une grande différence de lui aux deux autres prélats.

La duchesse de Richelieu mourut d’une longue, cruelle et bien étrange maladie. On lui trouva tous les os de la tête cariés jusqu’au cou, et tout le reste parfaitement sain. Elle étoit Acigné, de très-bonne maison de Bretagne, et fort proche parente de ma mère, qui étoit issue de germaine de sa mère, et fort de ses amies. C’est la seule dont M. de Richelieu ait eu des enfants.

La princesse d’Espinoy la mère mourut la veille ou le même jour plus tristement encore. Elle étoit du voyage de Compiègne, et vouloit être de celui de Marly qui le précédoit immédiatement. Allant à Versailles pour se présenter le soir même pour Marly, elle vint à six chevaux chez Mme de Saint-Simon dont la porte étoit encore fermée de sa couche, mais qui lui fut ouverte par l’amitié intime d’elle et de ses sœurs avec MM. de Duras et de Lorges dont j’ai parlé. Quoiqu’elle mit beaucoup de rouge, elle la parut tant partout où on n’en met point, et les veines si grosses, que Mme de Saint-Simon ne put s’empêcher de lui dire qu’elle feroit mieux de se faire saigner que d’aller à Versailles. Mme d’Espinoy répondit qu’elle en avoit été fort tentée par le grand besoin qu’elle s’en sentoit, mais qu’elle n’en avoit pas eu le temps à tout ce qu’elle avoit eu à faire avant Compiègne, qu’il falloit qu’elle allât à Marly, et que là elle se feroit saigner. Du logis elle alla débarquer tout droit chez M. de Barbezieux, à Versailles ; elle entra chez lui en bonne santé ; l’instant d’après elle se trouva mal ; on ne fit que la jeter sur le lit de Barbezieux ; elle étoit morte. On lui trouva la tête noyée de sang. Ce fut une vraie perte pour sa famille et pour ses amis, et elle en avoit beaucoup. C’étoit une femme d’esprit et de grand sens, bonne et aussi vraie et sûre que sa sœur de Soubise étoit fausse,