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et passa la nuit auprès de nos deux brigades dans la plaine de Stolhofen, comme chacun se trouva. Le lendemain 20, dès le matin, elle en passa le défilé, et rampa, la droite et le quartier général à Lichtenau, la gauche peu éloignée de Stolhofen, l’abbaye de Schwartzals vers le centre, un gros ruisseau à la tête du camp, et le Rhin à trois quarts de lieue derrière nous. Nous y demeurâmes dix ou douze jours pour voir ce que deviendroit le prince Louis de Bade, qui demeura dans son même camp de Muckensturm. De là nous primes celui de Lings, puis celui de Wilstedt, si proche du fort de Kehl qu’il rendit notre pont de bateaux inutile, et que par le pont de Strasbourg la communication était libre, sans escorte, et continuelle entre l’armée et cette place.

Le comte du Bourg fut chargé là d’un grand fourrage ; ce qui, joint à quelques autres bagatelles, brouilla le marquis de Renti avec le maréchal de Choiseul, son beau-frère. Renti étoit un très-galant homme, vaillant et homme de bien, mais avec cela épineux à l’excès. Le maréchal s’étoit fait une autre affaire avec Revel. C’étoit à lui à être de jour celui de la retraite et par conséquent à faire celle des deux arrière-gardes où le maréchal n’étoit pas. Le bonhomme Lafréselière, que toute l’armée aimoit et honoroit, et qui le méritoit, était lieutenant général aussi, et son retour tomboit immédiatement avant celui de Revel. Il étoit aussi lieutenant général de l’artillerie, il la commandoit, et par là il ne pouvoit prendre jour de lieutenant général dans l’armée, ni marcher à son tour qu’une fois dans la campagne. Il voulut prendre sa bisque d’être de jour à la retraite ; le maréchal, qui l’aimoit et qui comptoit sur sa capacité, décida en sa faveur, et Revel fut outré. Du camp de Wilstedt nous allâmes prendre celui d’Offenbourg.

Cet été ne fut que pluies universelles, et débordements partout qui interrompoient le commerce. Paris et ses environs furent inondés, à ce qu’on nous mandoit, et ce que