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Renti, avec toute la cavalerie, arriva le 3 juillet au fort Louis, où il passa le Rhin, et le même jour l’artillerie et les vivres joignirent aussi le maréchal de Choiseul assez près de la tête des chaussées. De toutes parts l’ordre et l’extrême diligence de l’exécution furent admirables. J’allai en arrivant voir le maréchal, qui ne m’en avoit dit qu’un mot léger à Ostoven, et qui m’en fit excuse sur ce qu’il n’avoit confié son projet qu’à ceux-là uniquement dont il ne se pouvoit passer pour l’exécution, dans la crainte que le prince de Bade ne portât quelques troupes dans la plaine de Stolhofen ; ce qui lui étoit bien aisé, et ce qui auroit empêché le passage du Rhin.

Pour tromper mieux M. de Bade, le marquis d’Huxelles, qui n’avoit à Spire que les troupes que Locmaria avoit amenées, et qu’il y avoit attendues absolument seul pendant vingt-quatre heures, fit passer le Rhin sur le pont de Philippsbourg à quelques troupes, et à force trompettes, cymbales et tambours, et persuada ainsi à l’ennemi que toute l’armée étoit là, ce qui le retint à trois lieues à Bruchsall où il étoit campé. Le maréchal, cependant, alla le 4 mettre son centre et son quartier général à Niederbühl, sa droite à Cupenheim, et sa gauche à Rastadt, la rivière de Murg coulant le long de la tête de son camp. Les bords de son côté en étoient hauts, et de l’autre ils étoient bas. On en rompit tous les gués, on retrancha bien la droite, on fit des redoutes, et de ces hauteurs on voyoit toute la plaine au delà de la Murg.

On accommoda bien Rastadt, et on prit toutes les précautions nécessaires pour bien assurer le camp.

Le prince de Bade, enfin détrompé, vint le 7 se mettre à Muckensturm, à demi-lieue de notre quartier général ; de là, à la Murg. Au delà d’elle il y avoit une assez grande plaine, toute remplie de fourrages. On auroit pu l’enlever le 6 ; mais on aima mieux laisser reposer l’armée, et le 7 l’arrivée du prince de Bade empêcha d’y plus penser ; mais le 8 la débandade fut générale, quelque chose qu’on pût