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foi et de leur ignorance. Elle ne peut plus se réserver d’autre droit que celui de déclarer que tel désert où on l’aura menée ne lui convient pas, et qu’il faut la conduire ailleurs ; mais ce droit ne peut guère lui servir qu’à faire, à ses dépens, une série d’expériences qui lui seront toujours inutiles, tant qu’elle laissera à ses guides à déterminer le but du voyage.

« Supposons, au contraire, que la caravane dise à ses conducteurs : Vous savez le chemin de La Mecque, menez-nous-y. Dans ce nouvel état de choses, les conducteurs ne sont plus des chefs, ils ne sont que des guides ; leurs fonctions, quoique très-importantes, ne sont que subalternes ; l’action principale est partie de la caravane. Chaque voyageur conserve le droit de faire, toutes les fois qu’il le juge convenable, des observations critiques sur la route que l’on tient, et de proposer, suivant ses lumières, les modifications qu’il croit utiles. Comme la discussion ne peut jamais rouler que sur une question très-positive et très-jugeable (nous éloignons-nous ou nous rapprochons-nous de La Mecque ?), ce n’est plus à la volonté des guides que la caravane obéit (en la supposant un peu éclairée), c’est à sa propre conviction,