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contraire avide d’instruction bien plus que les oisifs de nos salons, parce que ses travaux lui en font sentir à tout instant la nécessité. Partout où il a trouvé possibilité d’étudier, il a étudié. Mais quoique l’action de la capacité scientifique sur le peuple soit encore très-faible, eu égard à ce qu’elle peut devenir, il n’en est pas moins vrai qu’elle est beaucoup plus grande qu’on ne se le figure ordinairement. Des faits saillants et incontestables prouvent que le peuple accorde aujourd’hui a l’opinion unanime des savants le même degré de confiance qu’il accordait dans le moyen âge aux décisions du pouvoir spirituel.

Ainsi, par exemple, depuis environ un siècle, le peuple a cessé unanimement de croire à l’immobilité de la terre, il a admis la théorie astronomique moderne, et il y attache autant de certitude qu’il en a jamais attaché aux anciennes croyances religieuses. Quelle est la cause de cette révolution dans les opinions populaires ? Est-ce parce que le peuple a pris connaissance des démonstrations qui établissent la théorie du mouvement de la terre ? Certainement non, car ces démonstrations ne sont peut-être pas entendues de trois mille individus sur toute la population française. La confiance du peuple tient évidem-