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l’esclavage a rendu, par le fait même, tous les individus propriétaires ; il n’a plus existé depuis de prolétaires réels, dans l’acception rigoureuse de ce mot. Il est même à propos d’observer que la propriété industrielle née de l’affranchissement exige par sa nature une bien plus grande capacité que la propriété territoriale, telle qu’elle a existé depuis. Car celle-ci, quand elle existe séparément de la culture, n’exige d’autre talent que celui de jouir de ses revenus avec assez de modération pour ne pas entamer ses capitaux. C’est le cultivateur qui a besoin de capacité, et non le possesseur de la terre.

Le peuple étant devenu propriétaire a contracté peu à peu toutes les habitudes d’amour de l’ordre et du travail, toutes celles de prévoyance et de respect à la propriété[1], et en même temps il a acquis assez généralement en France, en Angleterre et dans le nord de l’Allemagne, le premier degré d’instruction.

Sans doute il reste beaucoup à faire sous ces

  1. Quand on a vu dans l’affreuse disette de 1794, au moment où la dernière classe du peuple était toute-puissante, cette même classe mourir de faim par milliers, sans que la tranquillité ait été troublée un seul instant sous ce rapport, on peut bien dire que le peuple français sait respecter la propriété.